Onco – HGE
Fiche réalisée selon le plan MGS
Item ECNi 300
Déf : l’adénocarcinome (ADK) gastrique est une tumeur épithéliale maligne de l’estomac, il représente 90 % des tumeurs gastriques.
Types histo : la classification histologique de Lauren distingue 2 types d’ADK
– Type intestinal glandulaire (bien ou moyennement différencié, sujet âgé ++)
– Type diffus (peu différencié, sujet jeune) à prédominance de cellules « en bague à chaton » (indépendantes, muco-sécrétantes), incluant ou non les linites.
Epidémio
– Incidence (Fr) = 6500 / an, en diminution
– 4000 décès / an en France, 2e cause de mortalité par cancer dans le monde
– Age moyen de survenue = 70 ans, sex-ratio masculin = 2
– Répartition géographique : zones à haut risque (Asie, Amérique du sud et centrale) et à bas risque (Europe de l’Ouest, Amérique du nord) 0
– Les cancers du cardia et les types diffus (linite) sont en augmentation, les formes distales et les ADK de type intestinal sont en diminution
Clinique | Paraclinique |
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± FdR Signes digestifs aspécifiques Révélation par une complication |
Endoscopie OGD avec biopsies multiples |
A ) Clinique
Groupe | FdR |
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Lésions précancéreuses | Gastrite chronique à H. Pylori * (ADK type intestinal, lymphome gastrique) Maladie de Biermer (ADK et tumeurs endocrines gastriques) Gastrectomie partielle (risque significatif à partir de 10 ans après l’opération) Ulcère gastrique Maladie de Ménétrier Polypes gastriques adénomateux |
Facteurs génétiques | ADK gastriques diffus héréditaire (1-3%, mutation cadhérine E 0) Syndrome de Lynch Polypose adénomateuse familiale (PAF) |
Facteurs environnementaux | Faible niveau socio-économique Faible consommation de fruits et légumes Forte consommation de nitrites et de sel Forte consommation de tabac Surcharge pondérale (pour les ADK du cardia) |
* Une interaction entre H. Pylori et les FdR environnementaux est probable. H. Pylori peut être en cause dans le développement d’un ADK gastrique même s’il n’est pas retrouvé sur les biopsies (l’atrophie et l’achlorhydrie induits par la gastrite sont peu propices à sa survie).
- Clinique
L’examen clinique est le plus souvent pauvre, il peut parfois retrouver une masse épigastrique.
Signes fonctionnels
– Dyspepsie, anorexie, dysphagie (cardia), vomissements (pylore), douleurs épigastriques
– AEG, amaigrissement (linite), asthénie, anémie
Signes physiques (syndrome tumoral)
– Complication : hémorragie digestive occulte (anémie ferriprive) ou extériorisée (hématémèse, méléna), péritonite par perforation
– Métastase révélatrice
– Syndrome paranéoplasique : phlébite, acanthosis nigricans
B ) Paraclinique
- Cas général
Endoscopie oeso-gastro-duodénale avec biopsies multiples : indispensable au diagnostic. On réalise 5 à 8 biopsies de la lésion sur les anomalies du relief muqueux, devant atteindre la sous-muqueuse si possible.
Cet examen précise
– Le siège de la lésion, la distance par rapport au cardia et au pylore
– L’aspect macroscopique : ulcéro-végétant, végétant, ulcéré, infiltrant, caractère superficiel ou profond
– Le type histologique
– L’existence de signes d’infection à H. Pylori, d’autant plus s’il existe une prédisposition héréditaire
– Recherche d’une surexpression HER2 1B (critères différents de ceux du cancer du sein)
- Cas particulier du linite
Endoscopie, écho-endoscopie : la sensibilité n’est que de 50 %, car l’infiltration tumorale est souvent profonde dans les formes linitiques ; elle est améliorée par la réalisation de biopsies « en puits ». L’examen montre de gros plis rigides (épaississement de la paroi gastrique prédominante au niveau de la sous-muqueuse), l’insufflation complète de l’estomac n’est pas obtenue.
TDM : aspect figé et rétréci de l’estomac
Histologie 1B : fibrose importante, prolifération faite de cellules indépendantes et peu nombreuses
C ) Diagnostic différentiel
Cliniquement : affections digestives bénignes (signes aspécifiques)
A l’endoscopie
– Ulcère gastrique (biopsies multiples, contrôle endoscopique post-traitement)
– Autres tumeurs de l’estomac : lymphome, tumeur stromale, tumeurs endocrines, métastase gastrique d’un autre cancer
Extension métastatique
– Foie, ganglions (Troisier), ovaires (tumeur de Krukenberg), carcinose péritonéale
– L’extension tumorale des linites est essentiellement lymphatique et péritonéale
Facteurs pronostiques
– Classification TNM et stade UICC
– Ratio nombre de ganglions envahis / nombre de ganglions prélevés
– Les linites sont généralement de mauvais pronostic (chirurgie rarement curative, cancer peu chimio-sensible)
Survie à 5 ans
– 15 % (global)
– Après traitement curatif chirurgical : 60 % si N0, 35 % si N1, 10 % si N2
– ADK superficiels (ne dépassant pas la sous-muqueuse) : > 90 %
A ) Bilan
Bilan d’extension
Bilan d’extension d’un ADK gastrique |
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Examens systématiques – Etat nutritionnel : IMC, pourcentage d’amaigrissement, albuminémie – Age physiologique – TDM thoraco-abdo-pelvienne : évaluation de la résécabilité, recherche de métastases |
Examens optionnels – Evaluation cardio (ECG, écho) et pulmonaire (EFR) selon le terrain – Echo-endoscopie : évalue l’extension pariétale et ganglionnaire, utile si suspicion de linite ou en cas de tumeur superficielle (indications à la mucosectomie ou pré-traitement néo-adjuvant) – Laparoscopie exploratrice : utile en cas de tumeur volumineuse de résécabilité douteuse |
Note : les marqueurs tumoraux (ACE et CA19.9) sont utiles au suivi mais pas au diagnostic.
Classification TNM des cancers UICC
TNM (2016) | |
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T | Tis : carcinome in situ T1 : tumeur envahissant le chorion (T1a) ou la sous-muqueuse (T1b) T2 : tumeur envahissant la musculeuse T3 : tumeur envahissant la sous-séreuse T4 : tumeur envahissant la séreuse (péritoine viscéral) sans envahissement des structures adjacentes (T4a) ou envahissant les structures adjacentes (T4b) |
N | N1 : envahissement de 1 à 2 ganglions lymphatiques régionaux * N2 : envahissement de 3 à 6 ganglions lymphatiques régionaux * N3 : envahissement de 7 à 15 ganglions lymphatiques régionaux * (N3a) ou de plus de 15 ganglions lymphatiques régionaux * (N3b) |
M | M1 : métastase à distance |
Stades UICC | |
Stade 0 | Tis N0 M0 |
Stade I | IA : T1 N0 M0 IB = T2 N0 M0 ou T1 N1 M0 |
Stade II | IIA = T3 N0 M0 ou T2 N1 M0 ou T1 N2 M0 IIB = T4a N0 M0 ou T3 N1 M0 ou T2 N2 M0 ou T1 N3 M0 |
Stade III | IIIA = T4a N1 M0 ou T3 N2 M0 ou T2 N3 M0 IIIB = T4a N2 M0 ou T4b N0-1 M0 ou T3 N3 M0 IIIC = T4a N3 M0 ou T4b N2-3 M0 |
Stade IV | Tout T tout N M1 |
* Les ganglions lymphatiques régionaux sont localisés en périgastrique (petite et grande courbure), le long de l’artère gastrique gauche, de l’artère hépatique commune, de l’artère splénique et du tronc coeliaque. Au niveau du cardia, les ganglions lymphatiques régionaux sont les ganglions paracardiaux, gastriques gauches, coeliaques, diaphragmatiques et para-oesophagiens médiastinaux inférieurs.
Note 1B : la classification présentée ici concerne les cancers gastriques situés à > 5 cm de la jonction oeso-gastrique ou ne dépassant pas celle-ci. Les cancers franchissant la jonction oeso-gastrique se rapportent à la classification TNM des cancers de l’oesophage, légèrement différente
B ) Traitement
- Traitement curatif : exérèse chirurgicale ± chimio ou radiochimiothérapie
Traitement chirurgical : exérèse complète de la tumeur + large exérèse ganglionnaire (≥ 15 ganglions périgastriques, voire curage élargi)
– ADK type intestinal de l’antre : gastrectomie partielle, anastomose gastro-jéjunale
– Autres localisations et linites : gastrectomie totale avec anse grêle montée en Y
– Tumeurs limitées à la muqueuse (Tis, T1a) : mucosectomie endoscopique discutée en RCP
Chimio néo-adjuvante et adjuvante : une chimiothérapie pré- et postopératoire (par docetaxel, 5-FU et oxaliplatine) doit être proposée à tous les malades de stade ≥ IB
Radio-chimiothérapie adjuvante 0 post-opératoire (par 5-FU) proposée aux malades n’ayant pas eu de chimiothérapie pré-opératoire dans 3 indications
Surveillance après traitement curatif : tous les 3-6 mois pendant 5 ans
– Examen clinique
– NFS, marqueurs tumoraux (ACE, CA 19.9)
– (Rx thoracique + écho abdominale) ou TDM thoraco-abdo-pelvienne
– Endoscopie pour surveillance du moignon après 10-15 ans si gastrectomie partielle 0
Prévention des complications
– Gastrectomie totale : supplémentation IM en vitamine B12
– Recherche de signes de complication chirurgicale précoce (thrombose, abcès…), mécanique et nutritionnelle
- Traitement palliatif 0 : cancers non-résécables et/ou métastatiques
Chirurgie d’exérèse palliative indiquée pour les tumeurs symptomatiques (hémorragie nécessitant des transfusions itératives, sténose), préférable à la chirurgie de dérivation.
Chimiothérapie : améliore la survie et la qualité de vie chez des patients sélectionnés à l’état général conservé 1A, avec adjonction de trastuzumab si la tumeur surexprime HER2 1B
Radiothérapie : parfois indiquée à visée hémostatique dans les tumeurs hémorragiques
Pose d’une prothèse métallique expansive par voie endoscopique : permet dans certains cas de lever un obstacle tumoral responsable d’une occlusion haute