1) Généralités 1A
Définitions :
Anaphylaxie 1A : « association de symptômes cardio-vasculaires, respiratoires, cutanés ou digestifs mettant en jeu le pronostic vital, d’apparition immédiate après le contact avec l’allergène ou des facteurs initiateurs non allergiques. »
Oedème de Quincke
– Angio-oedème (= urticaire profond) grave touchant la région laryngée et la région du cou 1A
– Infiltration des tissus sous-cutanés profonds à l’origine d’un œdème facial avec tuméfaction des paupières et des lèvres 1B
– Autre source 0 : terme désignant tout angio-œdème pour les uns, angio-œdème facial ou cervico-facial pour les autre
Note 0 : l’oedème de Quincke est une entité mal définie, mais les différentes sources s’accordent à dire qu’il s’agit d’un angio-oedème d’origine histaminique tirant sa gravité de l’atteinte des voies repiratoires hautes.
Physiopathologie : la réaction anaphylactique est une réaction immunologique aigüe par activation des mastocytes et basophiles. Depuis 2006, on distingue les causes :
– Allergique : activation IgE-dépendante. Production d’IgE spécifiques par les LB suite à la présence d’un allergène donné. Nécessite une sensibilisation préalable.
– Non allergique : activation non IgE-dépendante. La substance est directement responsable d’une activation des mastocytes et PN basophiles. Ne nécessite pas de sensibilisation préalable.
Epidémiologie (hors situation per-opératoire)
– 10 à 20 réactions sévères / an / 100 000 habitants, en augmentation
– 75 décès / an en France
Etiologies
– Cf. Liste des substances allergènes
– Les allergies alimentaires sont les plus fréquentes (50 % chez l’adulte, 90 % chez l’enfant)
– Les allergies médicamenteuses et aux venins d’hyménoptères représentent chacun 15-20 % des anaphylaxies
– Dans un contexte péri-opératoire, les curares puis le latex sont les premiers responsables
– Urticaire aquagénique (rare) 0
– Anaphylaxie Idiopathique (pas d’étiologie retrouvée, 20 – 30 % des cas)
2) Diagnostic 1A
Clinique | Paraclinique |
---|---|
Association de 3 critères : – Gène respiratoire «haute» et/ou AAG et/ou choc mettant en jeu le pronostic vital – Manifestations cutanéo-muqueuses – Début brutal et progression rapide des symptômes |
Augmentation de la Tryptase sérique (test a posteriori) |
A ) Clinique
-
Anamnèse
Chronologie
– ± Notion de sensibilisation préalable
– Notion de contact récent avec une substance allergène (souvent 5 min en cas de prise médicamenteuse, 15 min en cas de piqûres, 30min en cas d’allergie alimentaire). Au maximum, < 24h. 0
-
Signes clinique
Cardiovasculaire
– Hypotension artérielle
– Tachycardie
– Pâleur, hypotonie, malaise, lipothymie
– Trouble du rythme ou de la conduction
– Infarctus du myocarde
– Jusqu’à arrêt cardiaque
Cutanée et muqueuse
– Prurit (intense, initial)
– Rash cutané
– Urticaire superficiel
– Angio-œdème dont sa forme la plus grave, l’œdème de Quincke : tuméfaction mal délimitée, ferme, non-prurigineuse
Attention, peuvent être absents !!
Respiratoire
– Tableau d’asthme aigu grave
– Symptôme du à un œdème de Quincke : dyspnée, dysphonie, dysphagie, raucité de la voie, tirage, cornage…
Digestive (signe de gravité)
– Hypersiallorhée
– Nausée, vomissement
– Colique, diarrhée
-
Classification
Selon Ring et Messmer, on distingue 5 stades 1A, 1C
Grades de sévérité | Symptômes |
---|---|
I | Signes cutanéomuqueux, érythème, urticaire et/ou angio-œdème |
II | Atteinte multiviscérale modérée : signes cutanéomuqueux ± hypotension artérielle, tachycardie, toux, dyspnée, signes digestifs |
III | Atteinte mono ou multiviscérale : collapsus cardio-vasculaire, tachycardie ou bradycardie ± troubles du rythme cardiaque, bronchospasme, signes digestifs |
IV | Arrêt cardiaque |
V |
Décès |
B) Paraclinique
Aucun test diagnostic ne peut certifié une anaphylaxie dans un délai utile à la prise en charge en urgence. Le diagnostic sera donc posé sur la clinique.
A posteriori, on établit le diagnostic par le dosage de la tryptase sérique (systématique) :
– à H0, H1-2 et H24
– toute élévation du taux établit le diagnostic (même si les valeurs restent dans la limite normale)
Autres prélèvements
– Histamine : très vite indétectable (½ vie de 15 minutes)
– IgE anti-AQ (ammonium quaternaire) : dès que possible 2
– Autres IgE spécifiques : validés pour certains produits (venin d’hyménoptère, latex, cetains ATB, curares, hypnotiques) 1B
C) Différentiel
Selon la symptomatologie prédominante
DD d’un angio-œdème histaminique 1B
– Angio-œdème bradykinique : absence d’urticaire, douleur abdo fréquemment associée. Les causes sont médicamenteuses (prise d’IEC jusqu’à 6 mois 0), traumatiques ou héréditaires
– Causes de détresse respiratoire aiguë : crise d’asthme, laryngite, épiglottite, CE
– Syndrome cave supérieur, infections aiguës de la face (érysipèle, staphylococcie…) 1A
DD d’un choc
– Choc cardiogénique, septique, hémorragique
– Malaise vagal, hypoglycémie, mastocytose
3) Evolution 1A
L’évolution est très rapide ! « Plus la réaction survient vite, plus le risque qu’elle soit sévère est élevé ». Le décès peut survenir par asphyxie ou défaillance cardio-circulatoire..
Attention, il existe des réactions biphasiques (amélioration transitoire des symptômes avant une aggravation)
4) PEC
A ) Bilan 0
-
Bilan de gravité
Toute réaction anaphylactique est une urgence, avec risque d’évolution très rapide vers une forme grave. On notera les signes de gravité suivant :
– Gènes à la déglutition, phonation ou respiratoire
– Symptômes gastro-intestinaux persistant (douleurs abdominales, diarrhées)
Examen physique
– Tachycardie, hypoTA, hypoxémie (SpO2)
– Lésions cutanées d’urticaire généralisée
– Oedème de la glotte +++
– Stridor (œdème laryngé) ou sibilants (bronchospasme)
Recherche de facteur de risque de réaction anaphylactique grave
– Terrain à risque : maladie cardio-pulmonaire (dont asthmatique ++), mastocytose
– Circonstance à risque : effort, consommation d’alcool, infections aigüe, fièvre, stress
– Prise de β-bloquant, d’AINS
– Réaction initiale sévère
– Type d’allergène
-
Bilan étiologique : recherche de l’allergène
Il repose sur un bilan allergologique à 4-6 semaines 2
B ) Traitement immédiat 1A
URGENCE ABSOLUE
Hospitalisation : systématique, avec transport par SAMU, pour surveillance initiale
– 6h minimum 3, en cas de grade 1
– 24h minimum dans les cas sévères
Mesures immédiates (dès le grade 2)
– Arrêt du facteur déclenchant
– Adrénaline en urgence par voie IM (voie IV réservé aux spécialistes ou si grade 4), à répéter toutes les 5 minutes jusqu’à stabilisation du patient
– O2-thérapie selon saturation et contrôle des voies aeriennes supérieures
– Eventuellement prise en charge d’un bronchospasme (cf. Asthme) : CSI + BDCA
– Remplissage vasculaire (cf. Choc), horizontalisation et jambes surélevées
Note : le glucagon peut être utilisé en cas de non-réponse à l’adrénaline, en particulier chez des patients sous β-bloquants.
Cas particulier de l’oedème de Quincke (avec atteinte pharyngo-laryngée) 1B : adrénaline inhalée (à répéter / 15 min) + cortico IV d’action rapide (solumedrol) et anti-H1 (polaramine)
Glucocorticoïdes PO ou IV
– Si non-réponse à l’adrénaline (notamment patient sous β-bloquant) pour prévenir la gravité des réactions biphasiques 1A
– Son utilisation est discutée, elle ne doit pas retarder le traitement d’urgence 1B
C ) PEC au décours 1A
Mesures générale
– Eviction de l’allergène causal à vie (si possible)
– Réalisation d’une consultation d’allergologie à 4-6 semaines pour une PEC diagnostique, thérapeutique et éducationnelle !
– Déclaration de l’allergie médicamenteuse au centre de pharmaco-vigilance
– Trousse d’urgence avec seringue auto-injectable * (avec information et éducation !)
– Si ttt par β-bloquant : remplacement par une autre classe médicamenteuse !
* Il existe des indications absolues et relatives à l’adrénaline auto-injectable (disponibles sur le document de la CEP). 2 notions importantes :
– Pas nécessaire si une nouvelle exposition à l’allergène serait fortuite et improbable
– Indications plus larges chez l’enfant (meilleur rapport bénéfice / risque)
L’immunothérapie de désensibilisation est proposée en cas d’allergie grave
– au venins d’hymnoptère
– à certains médicaments indispensables
3 réponses à “Anaphylaxie”
On notera que
– le CEP parle de causes non allergiques, sans vraiment donner d’étiologies (en dehors de causes mixes médicamenteuses).
– les examens complémentaires indiqués dans le SFAR (histamines et IgE anti-AQ) ne sont pas repris par le CEP. Et n’ont pas l’air d’avoir un grand intérêt…
– les indications à la seringue auto-injectable sont détaillées dans le CEP, mais ne sont pas très compréhensibles…
Le CEP 6e édition 2018 mentionne le dosage de l’histamine dans les examens complémentaires. Il précise néanmoins le peu d’intérêt de cet examen.
Concernant l’oedème de Quincke :
Il est est difficile à placer dans la classification de Ring et Messmer vu les multiples définitions existantes (certaines impliquent d’emblée une certaine gravité). S’il s’agit uniquement de manifestation cutanéo-muqueuses il rentrerait a priori dans le grade 1, mais peut évoluer vers des grades plus sévères (« dans le contexte d’une détresse respiratoire aiguë, on est face à une réaction de grade III » CEMIR).
A noter une coquille (?) dans la classification Ring et Messmer du CEP : on retrouve dans le grade 1 « oedème angio-neurotique », qui semble plutôt se référer aux angio-oedèmes d’origine bradykinique et non histaminique comme dans l’allergie.