1) Généralité 1A
Déf : L’anévrisme est une dilatation focale et permanente de l’artère avec perte du parallèlisme des parois et diamètre > 1,5X le diamètre d’amont. L’anévrisme de l’aorte abdominale (AAA) est très souvent localisé en dessous des artères rénales 1B .
Physiopathologie : remaniement de la média aortique par perte de fibres élastiques et croissance progressive du diamètre de la paroi qui se trouve amincie, plus fragile. Les modifications de flux au contact de la paroi entrainent l’apparition d’un thrombus qui tapisse l’intima artériel.
Epidémio : la prévalence est de 5% après 65 ans chez les hommes
Etiologies
– Maladie athéromateuse +++
– Facteurs génétiques
– Anévrisme infectieux (syphilis)
– Evolution d’une dissection aortique
– Maladies du tissu conjonctif (maladie de Marfan, d’Ehlers Danlos)
– Vascularites touchant les gros vaisseaux (Takayasu, Horton, Behçet)
2) Diagnostic 1A
Clinique | Paraclinique |
---|---|
± masse battante abdo | Echo abdominale, angio-TDM |
A ) Clinique
Terrain, FdR : Les 4 principaux FdR sont
– le tabagisme
– l’age avancé
– le sexe masculin
– les ATCD familiaux d’AAA
Forme asymptomatique ++ : l’examen peut retrouver masse battante paraombilicale chez les sujets maigres ou si l’AAA est volumineux, ± souffle à l’auscultation
Formes symptomatiques : selon complication, notamment
– Douleur abdo / lombaire : doit faire redouter une rupture
– Choc hémorragique : rupture certaine
B ) Paraclinique 1C
Echographie abdominale : permet le dépistage et la surveillance des AAA. Elle précise :
– Diagnostic : Lumière aortique ectasiée anéchogène (diamètre > 50%)
– Topographie (préférentiellement sous-rénale)
– ± extension aux artères iliaques
– ± thrombus pariétal échogène
– homme > 65 ans, fumeur
– ATCD familiaux d’anévrisme (enfants et collatéraux du 1er degré après 50 ans)
– Maladie athéromateuse dans un autre territoire (AOMI, atteinte coronarienne)
Angio-TDM abdo-pelvienne : systématique (sauf choc) et en urgence en cas de forme douloureuse ; examen pré-thérapeutique de référence. Elle précise :
– Diamètre, topographie et extension de l’anévrisme
– Forme : fusiforme ou sacciforme
– Présence de thrombus endoluminal (pas de réhaussement après injection), de sténoses collatérales
– Anomalies pariétales : calcifications, inflammation péri-anévrismale
En cas de forme rompue des signes supplémentaires sont observés :
– Epanchement péri-aortique, rétropéritonéal le plus souvent
– ± zone de fissuration vue, extravasation du PdC
– ± rupture dans le tube digestif ou dans la veine cave inférieure
Angio-IRM en cas de CI au TDM (insuffisance rénale, allergie au PdC iodé) 1A
Remarque : Pas d’indication à l’artériographie 1A, 1B
C ) Diagnostic différentiel 0
Faux anévrismes : poche de sang communiquant avec une artère ou une cavité cardiaque avec destruction locale de la paroi (contrairement à l’anévrisme vrai).
3) Evolution 1
A) Histoire naturelle
La vitesse de croissance n’est pas linéaire, elle varie entre les patients et au cours du temps chez un même patient. Elle est d’autant plus rapide que le diamètre aortique est grand (= accélération). Un anévrisme à croissance rapide gagne > 1cm par an
B) Complications
-
Complications aigües :
Choc hémorragique par rupture d’AAA / hémopéritoine
Ischémie aigüe de membre inférieur : par embolie du thrombus intra-anévrismal, ou embole de cholestérol
-
Complications chroniques :
Erosion vertébrale : douleurs lombaires, cruralgies
Compression des organes de voisinage : axes veineux ilio-caves (sd cave inférieur), uretère (IRA obstructive) ou tube digestif (occlusion intestinale)
Rupture dans les structures de voisinage : fistule aorto-digestive ou aorto-cave
Infection de prothèse en cas de bactériémie 1B
-
Complications chirurgicales :
(Faux) anévrismes anastomotiques pour tous types de prothèses
Endofuite pour les endoprothèses : reprise de croissance de l’anévrisme
C) Pronostic 1B
Le risque de rupture d’anévrisme est fonction de son diamètre :
– Faible pour un anévrisme < 40mm (< 0.4% à 1 an)
– Important pour un anévrisme > 60mm (> 15% à 1 an)
– Important pour un anévrisme à croissance rapide > 10 mm/an
A diamètre égal, un anévrisme a 4 fois plus de chance de se rompre s’il siège chez une femme.
La rupture d’AAA reste particulièrement grave avec une mortalité de 80% 1A, mais ce sont habituellement d’autres complications athéromateuses qui sont à l’origine du décès 1B.
4) PEC 1A
A ) Bilan
Aucune imagerie ne doit retarder l’exploration chirurgicale en cas de choc hémorragique ! 1B
Bilan pré-opératoire
– Angio-TDM (ou angio-IRM), en urgence si forme symptomatique
– Bilan pré-op classique avec évaluation respiratoire, fonction rénale, recherche de coronaropathie, insuff cardiaque, sténose des TSA
Bilan d’extension : en dehors de l’urgence
– Bilan de la maladie athéromateuse
– Recherche d’autres anévrismes : iliaque, fémoral, poplité (échographie ou TDM) ou de l’aorte thoracique (TDM)
B ) Traitement
PEC des autres FdR CV, surtout
– arrêt du tabac ++
– ± anti-agrégant plaquettaire, statine, IEC
PEC chirurgicale : cure d’anévrisme chirurgicale ou endovasculaire
Indications selon le risque de rupture
– Diamètre > 50-55 mm (à discuter pour des diamètres inférieurs chez la femme)
– Croissance > 10 mm / an
Techniques
– Chirurgie conventionnelle = mise à plat-greffe : laparotomie ou lombotomie, clampage de l’aorte, ouverture de l’AAA, ablation du thrombus et suture d’une prothèse devant dépasser les bords supérieur et inférieur de l’anévrisme
– Chirurgie endovasculaire : déploiement de l’endoprothèse (stent-graft) par voie fémorale. Le risque opératoire est plus faible, mais il existe des CI anatomiques.
Remarque : ATBprophylaxie lors de tout acte thérapeutique à risque bactérien 1B
C ) Suivi
Pré-chirurgicale : Surveillance d’autant plus rapprochée que l’anévrisme est à risque de rupture
– Diamètre < 40mm : échographie tous les ans
– Diamètre de 40 à 55mm : échographie tous les 6 mois
Post-chirurgicale
– Prothèses de chirurgie conventionnelle : surveillance annuelle écho-doppler
– Endoprothèses : surveillance au long cours écho-doppler ou angio-TDM
Une réponse à “Anévrisme de l’aorte abdominale”
De nombreux points ne sont pas clair dans les 2 référentiels :
– Dépistage : il ne semble pas exister de critères précis. Pour les territoires de l’athérome (AOMI et atteinte coronarienne), cf bilan d’extension de la maladie athéromateuse dans la fiche athérome
– Bilan de la maladie athéromateuse : examen paraclinique systématique (ou bilan uniquement clinique) ?
– Indication des statines, IEC et anti-aggrégant plaquettaire : systématique ?
– Indication de l’ATBprophylaxie en cas de prothèse : quelles indications ?
– Suivi post-chirurgical des endoprothèse : quelle fréquence ?