1) Généralités 1
Déf : parasitose due à des trématodes à sexes séparés et hématophages : les schistosomes. On distingue 6 espèces : Schistosoma mansoni ++ , Schistosoma haematobium ++, Schistosoma mekongi, Schistosoma japonicum, Schistosoma intercalatum, Schistosoma guineensis.
Physiopathologie
– Action irritante des cercaires lors de la pénétration au travers de la peau
– Phénomène toxiques dus à la migration des schistosomules et des adultes
– Réactions immunitaires autours des œufs dans les tissus
. certains œufs au lieu d’être éliminés, restent bloquer dans les tissus ⇒ granulome bilharzien
. les granulomes bilharziens, confluent au cours des années et deviennes macroscopiques (bilharziomes)
– Dans leur évolution, les granulomes deviennent soit hyperplasiques ou soit nécrotiques et ulcéreuses, donnant ainsi lieu à des scléroses secondaires responsables de rétractions cicatricielles des organes contaminés ou de calcification des tissus
– Les atteintes extra-intestinales (cardio-vasculaire, neurologique et cutanées) sont dues à une migration erratique du parasite ou à une embolisation massive d’œufs vivants par les anastomoses porto-caves
Épidémiologie
– Répartition géographique selon l’espèce
. Schistosoma haematobium : toute l’Afrique, à Madagascar (côte ouest) et à l’île Maurice. Quelques foyer sur le pourtour méditerranéen (Maghreb) et au Proche-Orient.
. S. mansoni : la plus répandue dans le monde. Afrique tropicale +++, côte Est de Madagascar, Antilles, Amérique du Sud (seul espèce américaine), Péninsule arabique.
. S. japonicum : Asie +++ (Chine, Taïwan, Philippines, Célèbes). Éradiquée au Japon.
. S. mekongi : foyers limités en Thaïlande, au coufins du Laos et du Cambodge (le long du Mékong)
. S. intercalatum et S. guineensis : Afrique équatoriale de l’Ouest. République Démocratique du Congo (S. intercalatum) ; République Centrafricaine, République Populaire du Congo, Guinée équatoriale, Cameroun, Gabon, Nigéria, Angola, Tchad, Sao Tomé-et-Principes (S. guineensis)
– Contamination lors d’un bain en eau douce (même lors d’un bain bref de moins de minutes)
Parasitologie
Agent pathogène
– le ver adulte possède deux ventouses : une ventouse orale (s’ouvre dans l’œsophage) et une ventouse ventrale (organe de fixation).
– mâle
. ver blanc, à corps plat qui paraît cylindrique (enroulement de ses bords donnant le canal gynécophore où est logé la femelle)
. L = 10-15 mm sur l = 1 mm
– femelle : ver cylindrique et filiforme, L = 15-30 mm
Cycle évolutif
– La femelle est localisée selon l’espèce dans les fines ramifications de l’intestin ou de la vessie. Elles pondent leurs œufs qui tombent par effraction dans la cavité de l’organe et sont éliminés par les selles ou les urines.
– Une fois excrétés dans le milieu extérieur, lorsque les conditions sont favorables (eau douce, ph avoisinant la neutralité, température 18-33°C), ils libèrent le miracidium (forme avaire ciliée, durée de vie de quelques heures), qui nage à la rechercher de l’hôte intermédiaire (mollusque spécifique à chaque espèce)
– L’évolution de la larve dure 1 mois chez le mollusque à température adéquate ( 30°C). Le miracidium se transforme en sporocystes primaire puis en sporocystes secondaire (par bourgeonnement). Chacun d’eux donne naissance à la forme larvaire infectante excrétée par le mollusque : la cercaire (mobile +++ en eau douce, L= 0,5 mm, queue bifide ou fourchue : furcocercaire, durée de vie : quelques heures)
– Lors de la contamination, les cercaires sont attirés vers l’homme par chimiotactisme et pénètrent au travers des téguments de toute partie immergée de l’hôte définitif
– Au moment où la furcocercaire pénètre, elle se sépare de sa queue. La partie antérieure ou schistosomule, migre vers les vaisseaux portes intra-hépatique où elle devient adulte en 2-3 mois
– Les femelles fécondées après l’accouplement se séparent des mâles et s’engagent selon un tropisme propre à l’espèce dans les fines ramifications viscérales d’un plexus veineux déterminé.
Principaux caractères distincts des schistosomes | |||||
Espèce | Localisation du parasite | Voie d’élimination des œufs | Nombre d’œufs pondus par jour | Forme des œufs | Hôte intermédiaire |
S. haematobium | plexus veineux uro-génital et/ou rectal | vessie | 20-200 | Ovalaire à éperon terminal 150 x 60 μm | Bulinus, Physopsis |
S. mansoni | veine mésentérique inférieure | côlon | 100-300 | Ovalaire à éperon latéral 140 x 60 μm | Biomphalaria |
S. japonicum | veine mésentérique supérieure | intestin grêle | 500-3500 | Arrondi à éperon latéral peu visible 70 x 50 μm | Oncomelania |
S. mekongi | veine mésentérique supérieure | intestin grêle | Inconnu | Arrondi à éperon latéral peu visible 60 x 40 μm | Tricula |
S. intercalatum | plexus veineux péri-rectal | rectum | Inconnu | Ovalaire à éperon terminal 200 x 65 μm | Bulinus |
S. guineensis | plexus veineux péri-rectal | rectum | Inconnu | Ovalaire à éperon terminal 200 x 65 μm | Bulinus |
2) Diagnostic 1
Clinique | Paraclinique |
---|---|
Phase de contamination : asymptomatique, dermatite cercarienne dite « dermatite des nageurs » Phase d’invasion toxémique : asymptomatique, syndrome de Katayama Phase d’état variant d’un espèce à un autre |
Sérologie Examen parasitologique des selles et des urines |
A ) Clinique
-
Phase de contamination
– Asymptomatique
– Dermatite cercarienne dite « dermatite des nageurs »
. érythème cutanée allergique
. survenant 15-30 minutes après le bain infestant (S. japonicum et S. mekongi ++)
-
Phase d’invasion toxémique 1marquée pour S. mansoni ou S. japonicum et plus discrète pour S. haematobium ou S. intercalatum
– Asymptomatique en zone d’endémie
– Malaise générale (asthénie, fièvre, céphalées, anorexie) + troubles d’ordre allergiques (prurit, arthralgies, myalgies, poussée d’urticaire) = fièvre des safaris ou syndrome de Katayama
– ± encéphalites ou myocardites
-
Phase d’état
Incubation : quelques semaines à plusieurs années après la contamination
Schistosomose uro-génitale (S. haematobium)
– Hématurie inaugurale
. microscopique au début, puis macroscopique
. indolore et d’évolution capricieuse
. discrète et terminale au début, puis abondante et total avec des caillots
– Signes d’irritation vésicale
. douleurs mictionnelles irradiant vers les bourses et le périnée
. pollakiurie, crise de cystite
– colique néphrétique
Schistosomose intestinale (S. mansoni, S. intercalatum, S. guineensis)
– Manifestations intestinales
. alternance de crises diarrhéique (épisodes dysentérique d’intensité variable) et de constipation
. douleurs coliques (S. mansoni) et pathologie rectale (S. intercalatum)
. stries de sang entourant les selles (en cas d’infestation massive)
– Pathologie hépatosplénique
. allant jusqu’à une hypertension portale dans les formes graves) : S. mansoni
Schistosomose artério-veineuses (S. japonicum, S. mekongi)
– Grave +++
– atteinte hépatosplénique grave
. ictère
. hémorragie digestive par hypertension portale
. ascite, œdème et phénomène d’hypersplénisme
Schistosomose extra-intestinale (S. mansoni, S. japonicum ++)
– Atteintes cardio-vasculaires
– Atteinte neurologique
– Atteintes cutanées : lésions papulo-nodulaire parfois végétatives et ulcérées.
B ) Paraclinique
Diagnostic indirect (pas d’émission d’œufs pendant la phase d’invasion)
– hyperéosinophilie
– sérologie +++
. anticorps sériques spécifiques apparaissant progressivement 4-6 semaines après le bain contaminant
. aucun intérêt dans le suivi (demeure positif plusieurs mois après la guérison)
Diagnostic direct par mise en évidence des œufs (émission 2-3 mois après le bain infestant)
– recherche dans les urines (S. haematobium)
. sur culot de sédimentation des urines de 24 h ou
. sur une miction complète matinale si possible après un effort physique pré-mictionnel (marche à pied, montée d’un escalier, massage pelvien, sautillement, etc.)
. filtration des urines sur membrane (méthode sensible, fidèle et quantitative : nombre d’œufs/litre d’urine)
– recherche dans les selles (toutes les espèces)
. à répéter 3 fois au moins (sensibilité médiocre)
– biopsies rectales ++ ou vésicales
. performantes ++
. la forme des œufs et la position de l’éperon permettent l’identification de l’espèce
C ) Diagnostic différentiel 1
A la phase de contamination
– Schistosomose aviaire à Trichobilharzia : éruption maculo-papuleuse persistante prurigineuse ++ et sensible aux anti-histaminiques et/ou dermocorticoïdes
A la phase d’état 0
– cancer de la vessie 1
– cancers digestifs
– autres causes d’atteinte hépatosplénique avec hypertension portale
3) Evolution 1
A) Histoire naturelle
En l’absence du traitement, l’évolution se fait vers les complications avec un pronostic sombre.
B) Complications
Complications au niveau de l’arbre urinaire
– Fistule urétrale
– Sténose et dilatation urétrales
– Urétérohydronéphrose
– Surinfection
. cystite
. pyélonéphrite etc.
– Lithiase vésicale
– Glomérulonéphrite
– Extension aux organes de voisinages avec à la longue impuissante et/ou stérilité
. urétrite
. épididymite, spermatocystite, prostatite chez l’homme
. salpingite, endométrite, vaginite chez la femme
Complications communes aux schistosomoses humaines 2
– Cardiovasculaires : HTAP, signes d’insuffisance ventriculaire droite
– Neurologiques : HTIC, crises convulsives, myélite aiguë, compression médullaire
– Cutanées : bilharziomes essentiellement des organes génitaux externes, des régions périnéales et fessières
– Salmonelloses récidivantes
– Cancérologiques : carcinome épidermoïde vésical, adénocarcinome colique
4) PEC 1
A ) Bilan initial
BILAN de gravité |
Schistosomose urogénitale |
Schistosomose intestinale ou hépatosplénique |
Schistosomoses extra-intestinales |
B ) Traitement
Phase invasive
– traitement antischisostome inefficace (risque de réaction type Jarisch Herxheimer)
– corticothérapie (si symptômes +++)
Phase d’état
Praziquantel (Biltricide ®)
– Schistosomoses urogénitales et intestinales : 40 mg/kg per os en 1-2 prises pendant 1 seul jour (4 cp de 600 mg chez l’adulte)
– Schistosomoses artério-veineuses : 60 mg/kg
– Eviction des corticoïdes
C) Suivi
SUIVI |
Clinique et paraclinique (examen parasitologique des urines et des selles et NFS) : à M2, M6 et 1 an Risque d’augmentation des éosinophiles et anticorps antibilharziens dans les 2-3 mois (libération brutale d’antigène par lyse des vers) Echec thérapeutique et nouvelle cure de praziquantel si – hématurie persistante – réaugmentation de l’éosinophilie sanguine et – examen parasitologique positif au delà de 3 mois |
D) Prévention
-
Colletive
– Lutte contre les mollusques
– Amélioration des conditions sanitaires dans l’élimination des excrétats humains
– Traitement des sujets parasités
-
Individuelle
Eviction des bains en eaux douces ou saumâtres stagnantes (même très courtes et très partielles immersions)