1) Généralités 2
Déf : la dermatose à IgA linéaire (DIGAL) est une dermatose auto-immune de la jonction dermo-épidermique caractérisée par des dépôts linéaires d’auto-anticorps IgA isolés ou prédominants à la jonction dermo-épidermique.
Pathogénie : les IgA sont dirigés contre un fragment protéolytique de la BP180 (fragment 97 ou 120 kD et/ou d’autres constituants de la membrane basale dermo-épidermique.
Épidémiologie : dermatose bulleuse auto-immune la plus fréquente chez l’enfant (sexe masculin ++)
Etiologies
Induction possible par des médicaments
– Vancomycine +++
– Pénicilline
– AINS (naproxène, piroxicam)
– Inhibiteurs de l’enzyme de conversion (captopril)
– Anti-convulsivants (carbamazépine, phénytoïne)
– Inhibiteurs de l’HMG-CoA réductase (atorvastatine)
– Etc.
2) Diagnostic 2
Clinique | Paraclinique |
---|---|
Lésions cutanées caractéristique | Histologie IFD ++ |
A ) Clinique
-
Anamnèse
Terrain
– Enfant
. début à 5 -10 ans ++
. sexe masculin ++
– Adulte
. début vers 50 ans
. pas de prédominance de sexe
– Notion de prise médicamenteuse +++
-
Examen physique
– Chez l’enfant (lésions stéréotypées)
. lésions typiquement en « rosettes » ou en bouquets herpétiformes sur peau saine (vésicules à groupement arrondi 1)
. Topographie : peuvent toucher tout le tégument, atteinte périnéale, fessière, organes génitaux, cuisses, région péribuccale, oreilles. Atteinte muqueuse rare.
– Chez l’adulte (lésions polymorphes)
. Disposition « en rosette » est inconstante ; les bulles siégeant en peau saine ou érythémateuse
. Pas de cicatrices atrophiques
. Atteinte muqueuse (buccale, oculaire, …) présente dans 30% des cas
B ) Paraclinique
Histologie
– Biopsie d’une lésion récente
– Montre une bulle sous-épidermique et un infiltrat dermique superficiel composé de polynucléaires neutrophiles et de quelques éosinophiles réalisant parfois des micro-abcès au sommet des papilles similaires à ceux observés dans la dermatite herpétiforme
Imunofluorescence directe
– Biopsie en peau péribulleuse
– Montre des dépôts fins et linéaires d’IgA ± IgG, C3 le long de la membrane basale dermo-épidermique.
Immunomicroscopie électronique (Diagnostic de certitude)
– Réalisation souhaitable dans les DIGAL idiopathiques de l’adulte ou de l’enfant avec atteinte muqueuse
– Dépôts réalisant typiquement une image en miroir, siégeant sur la lamina lucida et sous la lamina densa.
– Autres aspects : dépôts uniquement dans la lamina lucida ou au contraire dans le derme superficiel
Immunofluorescence indirecte
– Recherche d’anticorps circulants anti-membrane basale de type IgA (IgA1)
– Inconstamment positive, taux en général faibles
C ) Diagnostic différentiel
– Erythème polymorphe
– Syndrome de Stevens-Johnson
– Syndrome de Lyell
– Eruption morbilliforme sans bulles
– Erythème annulaire centrifuge
3) Evolution 2
A) Histoire naturelle
– Evolution chronique
– Alternance de périodes de poussées et rémissions pendant plusieurs années
B) Complications
– La DIGAL peut être source de séquelles définitives
. atteinte propres (ophtalmologique, buccale, œsophagienne, anale notamment)
. effets secondaires du traitement
4) PEC 2
A ) Bilan initial
bilan |
Examen clinique complet : recherche d’arguments pour une maladie digestive chronique (maladie de Crohn, colite ulcéreuse, etc.) |
Examens complémentaires selon orientation de la clinique |
B ) Traitement
-
Objectif du traitement
– Cicatrisation des lésions actives
– Prévention de l’apparition de nouvelles lésions
– Education thérapeutique
-
Modalités thérapeutiques
DIGAL induite par un médicament
– Résolution rapide à l’arrêt du médicament ++
. Arrêt définitif et contre-indication à vie du médicament imputable ;
. Abstention ou corticothérapie courte
– En cas d’évolution défavorable et d’autonomisation : dapsone
DIGAL idiopathique
Traitement de fond de la DIGAL de l’adulte
– Dapsone +++
. dose d’attaque : 50-100 mg/jour (adapter la posologie à la réponse thérapeutique et maintenir jusqu’au contrôle de la maladie)
. Décroissance très progressive jusqu’à une valeur minimale seuil (variable selon les patients)
. Arrêt du traitement au bout de quelques années si l’IFD se négative
– En cas d’intolérance (hors toxidermie) à la dapsone : sulfasalazine 3-6 g/j
– Corticothérapie générale parfois compétée d’immunosuppresseurs (mycophénolate mofétil, azathioprine, ciclosporine) réservée aux formes sévères et résistantes.
Traitement de fond de la DIGAL de l’enfant
– Dapsone 2mg/kg/j sous surveillance clinique et biologique
– Si échec : sulfasalazine 1.5 – 3 g/j sous surveillance biologique adaptée
– Corticothérapie générale réservée aux formes sévères et résistantes
– Dans certaines littérature : traitement de première intention par antibiothérapie générale (oxacilline ou macrolide) peut être proposé pour éviter temporairement le recours à la dapsone.
Traitement locaux
Soins locaux cutanés
– Comptage et perçage des bulles
– Tamponnement des zones suintantes avec une solution asséchante
– Utilisation de bains contenant des antiseptiques et/ou de l’amidon de blé
– En cas de lésions érosives étendues : elles peuvent être couvertes par des pansements utilisant des compresses, de préférence non adhérentes (réduire la surinfection, les douleurs, faciliter la cicatrisation)
– Lésions érosives pouvant être traitées par des applications de dermocorticoïdes : Dipropionate de betamethasone ou propionate de clobetasol (adulte) ou desonide (enfant)
Traitement locaux pouvant être appliqués sur la muqueuse buccale
– A n’utiliser que sur des lésions accessibles
– Préparer magistrale
. corticothérapie locale forte (clobétasol) + Orabase ® : à appliquer directement sur les lésions
– Clobétasol gel
– Bains de bouche avec prednisolone effervescent ou spray corticoïde
– Injections locales de corticoïdes (à discuter sur des lésions récalcitrantes de la muqueuse jugale ; situation exceptionnelle)
– Soins dentaires en dehors des poussées
C) Suivi
suivi |
Suivi mensuel jusqu’au contrôle de la maladie (puis espacé) – Surveillance clinique : cicatrisation des lésions (cutanées et muqueuses éventuelles), courbe de croissance chez l’enfant, tolérance du traitement – Surveillance biologique : tolérance du traitement (dapsone ++) – Pas d’intérêt à la surveillance immunologique |