Urgences – Cardio – Vasculaire
Fiche réalisée selon le plan MGS
Item ECNi 328
1) Généralité 1A
Déf : l’état de choc se définit par une inadéquation entre les apports tissulaires en O2 = TaO2, et les besoins tissulaires correspondant à une consommation d’oxygène = VO2.
TaO2 = CaO2 x DC = 1,34 x [Hb] (g/dL) x SaO2 x DC
VO2 = (CaO2 – CvO2) x DC
CaO2 : contenu artériel en O2 ; CvO2 : contenu veineux en O2, DC : débit cardiaque ; SaO2 : saturation artérielle en O2 ; TaO2 = transport artériel en O2
Physiopathologie : en situation physiologique, le TaO2 est un débit suffisant au métabolisme aérobie, la VO2 reste donc fixe et indépendante du TaO2.
En cas de baisse d’apport tissulaire, des mécanismes compensateurs s’installent avec pour finalité d’augmenter le TaO2 et l’extraction d’oxygène, en particulier pour les organes dits nobles : cœur et cerveau
– Vasoconstriction périphérique via le système sympathique
– Maintien d’une volémie efficace via 2 systèmes hormonaux (SRAA et ADH)
En deçà d’un TaO2 critique, ces mécanismes décompensent et une relation linéaire s’installe entre TaO2 et VO2, c’est une situation de dysoxie et le métabolisme anaérobie prend une proportion de plus en plus importante. Il en découle des effets communs à tous les types de choc :
– Augmentation des lactates sanguins liée au métabolisme anaérobie
– Inflammation systémique : qui peut être cause ou conséquence du choc, liée à l’hypoxie ou à la reperfusion, elle modifie l’état tensionnel (cf. item 181)
Classification : on distingue 4 grands types de choc. Plusieurs mécanismes peuvent être associés (ex : l’état de choc du grand brûlé comporte une part hypovolémique + une part distributive par inflammation systémique)
Mécanisme | Eléments caractéristiques (peuvent varier selon l’étiologie) | Causes |
---|---|---|
CARDIOGENIQUE | Baisse DC, augm. pressions de remplissage (signes d’insuffisance cardiaque G et Dte) | Trouble inotropisme : IdM, myocardite, toxique (β-bloq., ICa, quinine…), Tako-Tsubo Tbl du rythme graves : BAV haut degré, TV, TSV rapide Mécanique : IM ou IA aiguë, rupture septale, thrombus/tumeur |
HYPOVOLEMIQUE | Baisse précharge cardiaque Vasoconstriction réflexe artérielle et veineuse (décompensation à -30% de volume sanguin) |
Causes d’hypovolémie absolue : hémorragie, DEC |
DISTRIBUTIF | Diminution de l’extraction tissulaire en O2 Hypovolémie relative (vasodilatation périph. + augm. perméabilité vasculaire) |
Causes d’hypovolémie relative : – Choc septique (définition particulière) – Choc anaphylactique – Inflammation systémique (pancréatite aiguë, brûlure étendue…) – Choc cytokinique (lymphomes) – Choc spinal (section médullaire)… |
OBSTRUCTIF | Baisse DC, augm. pressions de remplissage (signes d’insuffisance cardiaque Dte ++) | Tamponnade Pneumothorax compressif (« tamponnade gazeuse ») EP massive |
2) Diagnostic 1A
Clinique | Paraclinique |
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Hypotension artérielle + signes d’hypoperfusion et/ou signes de défaillance d’organe + Persistance de l’hypotension après remplissage vasculaire pour le choc septique |
Hyperlactatémie |
A ) Clinique
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Signes communs
Hypotension artérielle : définie par
– PAS < 90 mmHg
– Ou PAM < 65 mmHg
– Ou baisse significative : -30 % ou -40mmHg
Signes d’hypoperfusion périphérique et compensation initiale
– Marbrures
– Cyanose / pâleur / temps de recoloration cutanée > 3s / extrémités froides
– Tachycardie / polypnée
Signes de défaillance d’organe
– Troubles de la conscience : confusion, agitation, coma
– Oligurie
– Diarrhée
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Eléments d’orientation sur le mécanisme / l’étiologie
Antécédents ++
– Cardiaques
– Allergiques
– FdR hémorragiques : trauma, saignement occulte (penser au TR), thrombopénies
– FdR de MTE
– FdR infectieux : immunodépression
– Maladies auto-immunes et inflammatoires, cancers, FdR de déshydratation…
Pression artérielle
– Une PAD effondrée (< 40 mmHg) traduit une vasoplégie (choc distributif ++)
– Une faible valeur de pression différentielle (PAS – PAD) est en faveur d’un choc hypovolémique ou cardiogénique
Note 0 : le mécanisme est parfois déduit à posteriori en l’absence d’informations suffisantes, grâce à un traitement d’épreuve (ex : ATBthérapie large spectre pour suspicion de choc septique, adrénaline pour le choc anaphylactique…)
B ) Paraclinique
En dehors de l’augmentation de la lactatémie, aucun examen paraclinique n’est nécessaire pour affirmer l’état de choc.
3) Evolution 1A
La gravité d’un état de choc
– Se mesure au nombre et à l’importance des défaillances viscérales
– Dépend de la réserve physiologique du patient (capacité de résistance à l’état de choc) et aux paramètres pronostiques habituels des urgences vitales (délai de prise en charge, âge, comorbidités…)
Pronostic : la mortalité du choc septique atteint 50% en service de réanimation 0. L’extension des marbrures aux membres inférieurs a prouvé son rôle péjoratif sur le pronostic dans le choc septique 1A.
4) PEC 1A
A ) Bilan initial
Un bilan minimum systématique est à réaliser.
Bilan devant un état de choc |
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Clinique : glasgow, température, FC, FR, pression artérielle (‘sanglante’ = intra-artérielle le plus souvent), diurèse, état d’hydratation clinique 0 |
Biologique – NFS, plaquettes, PCT si possible, CRP – Hémostase : TP, TCA, fibrinogène – Gaz du sang, lactatémie – BH, LDH, CPK, troponines – Ionogramme, urée, créatinine sanguins – Bilan pré-transfusionnel : groupage x2, RAI – Hémocultures x2 – β-hCG chez la femme en âge de procréer |
Imagerie – RxT – ECG, ETT ± ETO |
Autres selon l’orientation : PL, ECBU, ECBC, LBA, scanner, coronarographie… |
B ) Traitement
Dans tous les cas, mise en place d’un scope avec surveillance continue et transfert en réanimation.
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Mesures communes à mettre en place en urgence
1) Oxygénothérapie : au masque voire ventilation invasive si choc sévère / insuff. respiratoire aiguë / agitation
2) Voies d’abord vasculaires
– 2 VVP et une voie artérielle systématiques
– ± VVC ssi capital veineux faible, en prévision d’un traitement veinotoxique (catécholamines, vanco…), ou utilisation de solutés hyperosmolaires
3) Remplissage vasculaire : objectif de PAM > 65 mmHg
– Précédé d’une épreuve de levée de jambe pour évaluer la tolérance cardiaque
– Epreuve de remplissage : 250-500cc en débit libre, puis réévaluation
– Utilisation de cristalloïdes en 1ère intention (soluté salé isotonique et ringer lactate), ± colloïdes si le volume de cristalloïdes utilisé est important
4) ± Catécholamines à la SAP (! jamais en bolus !). Choix de la molécule :
– Choc cardiogénique avec signes congestifs : dobutamine ± noradrénaline ou adrénaline
– Choc anaphylactique : adrénaline
– Autres types de choc : noradrénaline
Récepteurs cibles et principaux effets des catécholamines
Récepteur… | Dobutamine | Adrénaline | Noradrénaline | Isoprénaline |
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α1 : vasoconstriction | 0 | +++ | +++ | 0 |
β1 : inotrope pos., mais aussi dromo, chrono et bathmotrope + | +++ | ++ | ++ | +++ |
β2 : bronchodilatation | ++ | +++ | + | +++ |
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Mesures spécifiques par type de choc / PEC étiologique
Choc septique : cf. fiche Bactériémie, sepsis et choc septique
Choc anaphylactique : cf. fiche Anaphylaxie
Choc hémorragique
– Transfusion de CGR précoce pour prévenir l’hémodilution et la coagulopathie associée (cf. Transfusion en urgence), objectif Hb > 7-9 g/dL
– Transfusion de PFC précoce, objectif TP > 40 %, au moins 1 pour 2 CGR
– ± Fibrinogène, objectif fibrinogénémie > 1,5-2 g/L
Choc cardiogénique
– Trouble du rythme mal toléré : amiodarone, choc électrique
– Troubles conductifs type BAV complet : isoprénaline IV et/ou sonde d’entraînement électrosystolique implantée à la pointe du VD par voie veineuse
– Anticoagulation curative par HNF, notamment si troubles du rythme
– PEC de l’insuffisance cardiaque aiguë et de l’étiologie