1) Généralités 1
Déf : mycoses dues à Histoplasma capsulatum dont il existe deux variantes : Histoplasma capsulatum var. capsulatum et Histoplasma capsulatum var. duboisii
Physiopathologie
En ce qui concerne Histoplasma capsulatum var. capsulatum
L’immunité anti-histoplasme est sous la dépendance des lymphocytes T CD4 surtout, et des cytokines pouvant stimuler la fonction macrophagique (IFN α ++). Chez les patients séropostifs au VIIH avec un taux de CD4 bas, l’histoplasmose peut se réactiver de nombreuses années après la primo-infection.
Épidémiologie :
Histoplasmose à H. capsulatum var. capsulatum
– Données épidémiologiques
. forme la plus fréquente et la plus redoutable
. patients vivants avec le sida ++ (1/3 des observations)
. zones d’endémies : Etats-Unis (exception faite des Etats de l’ouest), Amérique centrale et Amérique du Sud (dont Caraïbes et Guyane), Afrique intertropicale et du Sud, Asie et Océanie (notamment Nouvelle-Calédonie)
. absente sur le continent Européen
. mycose opportuniste d’importation (séjour en zone d’endémie même remontant à plusieurs années) le plus souvent rencontré en France métropolitaine (plus de 10 nouveaux cas par an)
. épidémies localisées survenant lors de la destruction de pigeonniers, poulaillers, du creusement d’un puits, du percement d’un tunnel ou encore lors de la démolition d’un bâtiment ou lors de l’exploration de grottes au cours d’une expédition de spéléologie
– Mode de contamination
. inhalation de spores aéroportées et issues de la forme filamenteuse
. pas de contamination interhumaine par voie aéroportée
Histoplasmose à H. capsulatum var. duboisii
– Données épidémiologie
. moins fréquente
. limitée au continent africain
– Mode de contamination
. présumée d’origine aérienne
. origine transcutanée incriminée aussi (blessure tellurique)
Mycologie
H. capsulatum var. capsulatum
> Agent pathogène
– Champignon dimorphique présent dans les sols enrichis en fientes d’oiseaux (pigeons, étourneaux, volailles) et en guano de chauve-souris
– Agent de l’histoplasmose à petites formes ou « maladie de Darling »
> Cycle évolutif
Après contamination de l’Homme par inhalation des spores, ces dernières sont phagocytées par les macrophages où elles se transforment en petits éléments lévuriformes. Ces éléments se multiplient et infectent par la suite d’autres cellules. La dissémination se fait par voie hématogène.
H. capsulatum var. duboisii
> Agent Pathogène
– Biotope naturel de l’espèce mal connu (exceptionnellement isolée du sol)
> Cycle évolutif
Après contamination, la spore est phagocytés par le système macrophagique et prend la forme d’une grande levure de 8-15 μm de longueur qui s’y multiplient. Cette espèce dissémine par voie lymphatique et envahit surtout la peau, les ganglions et le tissu osseux.
2) Diagnostic 1
Clinique | Paraclinique |
---|---|
Histoplasmose à Histoplasma capsulum var. capsulum Asymptomatique Atteinte pulmonaire aiguë primitive de primo-infection Forme disséminée et forme tertiaire ou pulmonaire chronique Histoplasmose à Histoplasma capsulum var. gondii Atteintes cutanées ++, sous-cutanée, osseuse et viscérale |
Examen direct Culture |
A ) Clinique
-
Histoplasmose à Histoplasma capsulatum var. capsulatum
Forme pulmonaire aiguë primitive de primo-infection
– Incubation : 5-10 jours
– Syndrome pseudo-grippal avec fièvre, toux, dyspnée
– Réaction immunoallergique (érythème noueux)
Forme disséminée
– Survient plusieurs semaines, mois, voire années (jusqu’à plus de 50 ans) après la forme primitive
– Terrain : fragilisé, immunodéprimé (sida par ex)
– Atteintes viscérales multiples : adénopathies, hépatomégalie, splénomégalie
– Lésions buccales
. chute des dents
. ulcère de la langue et du palais
– Signes cutanés disséminés (papules ombiliquées)
– AEG ++, dénutrition importante
– Localisation plus profondes : surrénalienne ++, digestive, hépatique, cardiaque, neurologique
Forme tertiaire ou pulmonaire chronique : toux, hémoptysie, dyspnée pouvant évoluer vers une insuffisance respiratoire
-
Histoplasmose à Histoplasma capsulatum var. duboisii
Atteintes cutanées
– Les plus fréquentes
– Aspect de papules ou de nodules souvent pédiculés sur les membres et le visage
– Ulcères au niveau des plis ++
Atteintes sous-cutanées
– Forme d’abcès ou de masses sous-cutanées parfois volumineuses sur le thorax
– Parfois forme d’adénopathie axillaires, cervicales, inguinales) pouvant être volumineuses.
Atteintes osseuses : atteintes lytiques au niveau du maxillaire mais aussi du crâne, du genou ou de la colonne vertébrale
Atteintes viscérales : localisations pulmonaire, hépatiques, spléniques et surrénaliennes
B ) Paraclinique
-
Histoplasmose à Histoplasma capsulatum var. capsulatum
Prélèvements
– Moelle osseuse
– Peau
– Muqueuse
– Sérosité
– Expectorations
– Lavage bronchiolo-alvéolaire
– Liquide cérébrospinal
– Biopsies, etc.
Les prélèvements doivent être rapidement acheminés au laboratoire.
Note : le laboratoire soit être informé de la possibilité d’une histoplasmose pour ne pas ouvrir les tubes de culture
Diagnostic mycologique
Examen direct
– réalisé au moyen d’une coloration May-Grünwald Giemsa (MGG)
– diagnostic immédiat, met en évidence le champignon sous forme de petits éléments arrondis (petites formes), ovoïdes, sphériques, de 3-5 μm de diamètre, colorés intensément en violet et entourés d’un halo clair (membrane non colorée par le MGG)
– ces éléments ne produisent pas de filament et sont habituellement intracellulaires
– ils sont aussi visualisés par la coloration de Gram et le PAS (colorés en rouge)
Cultures
– laboratoire de sécurité type NSB3 (agent infectieux de classe 3)
– culture sur milieu de Sabouraud entre 25-30°C : forme de colonies blanches duveteuses
– examen microscopique permet l’observation de mycélium et de grosses spores spiculées (macroconidies) caractéristiques associées à des petites spores (microconidies)
Note : ces formes saprophytiques filamenteuses très infectieuses représentent un réel danger pour le personnel des laboratoires.
Examen anatomopathologique
On distingue deux formes selon l’état immunitaire du sujet :
– forme tuberculoïdes (réponse immunitaire de l’hôte efficace) : infiltrats lymphohistiocytaires ou granulomateux riches en macrophages activés et en lymphocytes T CD4. Les rares histoplasmes entourés d’un halo clair observés à l(intérieur des cellules histiocytaires : coloration argentique contributive ay diagnostic.
– forme anergique (patients séropositifs au VIH) : abondance de levures intracellulaires mais aussi extracellulaires. Beaucoup d’organes touchés (foie, rate, tube digestif, surrénales, os, moelle osseuse)
Détection d’antigènes circulants
– test antigénique spécifique indisponible en France
– méthodes de PCR développés
Diagnostic indirect
– sérologie réalisée uniquement dans les laboratoires spécialisés
– souvent négative chez les patients immunodéprimés
-
Histoplasmose à Histoplasma capsulatum var. duboisii
Examen direct
– mettre en évidence à l’état frais ou après coloration au MGG à partir des prélèvements (pus, sérosités) ou des appositions de ganglions, les « grandes formes »
– ce sont des levures de 10-15 μm à paroi en double contour en forme de « 8 » de sablier (base fine d’implantation du bourgeonnement)
Culture
– Milieu de Sabouraud à 25°C ou 35°C
– idem que H. capsulatum var. capsulatum
Examen anatomopathologique : réaction granulomateuse à « cellules géantes » contenant de grands éléments arrondis ou ovalaires en position intrahistiocytaire.
C ) Diagnostic différentiel
-
Histoplasmose à Histoplasma capsulatum var. capsulatum
– Devant la forme disséminée
. tuberculose
. leishmaniose viscérale
. en Asie : pénicilliose à Talaromyces marneffei (ex Penicillium marneffei)
. hémopathies
. maladie de Hodgkin
– Devant la forme pulmonaire chronique : tuberculose
-
Histoplasmose à Histoplasma capsulatum var. duboisii
– Devant les atteintes cutanées : molluscum contagiosum
– Devant les atteintes sous-cutanées
. adénite tuberculeuse
. abcès froid
– Devant l’atteinte de la colonne vertébrale : mal de pott
– Devant les atteintes viscérales sur le continent africain : tuberculose, lèpre
3) Evolution 1
A) Histoire naturelle
Le pronostic est en général sombre surtout pour H. capsulatum var. capsulatum.
Toutefois, chez l’immunocompétent, les formes pulmonaires aiguës isolées de primo-infection ou paucisymptomatiques guérissent spontanément.
B) Complications
L’atteinte pulmonaire chronique liée à H. capsulatum var. capsulatum peut se compliquer d’une insuffisance respiratoire et d’un cœur pulmonaire chronique.
4) PEC 1
A ) Bilan initial
Bilan de gravité |
Radiographie pulmonaire – Forme pulmonaire aiguë primitive de primo-infection : adénopathies unilatérales ou bilatérales, infiltrations parenchymateuses, images macro ou micronodulaire évoluant secondairement vers des calcifications – Forme tertiaire : aspect cavitaire |
B ) Traitement
-
Histoplasmose à H. capsulatum var. capsulatum
Formes pulmonaires aiguës isolées de primo-infection (en cas d’absence d’amélioration)
– itraconazole (sporanox ® et ses génériques) à 200 mg/jour pendant 6-12 semaines
En cas de symptomatologie pulmonaire sévère aiguë chez l’immunocompétent : itraconazole 200-400 mg/jour pendant 12 semaines
Chez les patients nécessitant un ventilation mécanique
– Amphotécérine B sous forme lipidique
– associée à une corticothérapie : prednisolone 60 mg/jour pendant 15 jours
En cas d’histoplasmose disséminée
– Amphotécérine B liposomale (Ambisome ®) pendant les 3 premières semaines et relais par itraconazole 200-400 mg/jour pendant 2-4 mois
– Fluconazole 200-400 mg/jour si échec ou intolérance de l’Amphotécérine B
Chez les patients sidéens
– l’Amphotécérine B conventionnelle en traitement d’attaque peut être remplacée avantageusement par l’Amphotocérine B liposomale (Ambisome ®), le relais étant pris soit par l’itraconazole ou par le fluconazole
– Le voriconazole (Vfend ®) et le posaconazole (Noxafil ®) sont des alternatives.
-
Histoplasmose à H. capsulatum var. duboisii
– Amphotécérine B 2g/cure (0,7-1 mg/kg/jour)
– Relais par itraconazole 200-400 mg/kg pendant 1 an
– Drainage et mise à plat d’un abcès ou d’une masse sous-cutanée facilement extirpable (diminution de la charge fongique)
C) Suivi
Surveillance clinique et biologique à l’arrêt du traitement (risque de rechutes)
D) Prévention
Concerne H. capsulatum var. capsulatum
– Dans les régions endémiques
. prophylaxie primaire par itraconazole pour personne vivant avec les VIH à raison de 200 mg/jour si taux de CD4 < 150/mm3
. prophylaxie secondaire tant que persiste l’immunodépression : itraconazole 200-400 mg/jour
– Eviter les biotopes à chauve-souris (creux d’arbres, grottes, tunnels)