Neuro – Infectiologie
Fiche réalisée selon le plan MGS
Item ECNi 148
1) Généralité 1B
Définitions : Inflammation des enveloppes méningées due à une bactérie, avec LCS purulent. Une atteinte encéphalitique peut être associée.
Epidemio : incidence de 2,2/100.000 hab/an en France 1C
Microbio : On retrouve surtout le méningocoque et le pneumocoque ! Les autres sont rares et/ou sur des terrains particuliers.
– Méningocoque (diploque gram -) : 30% (500cas/an en France) ; plus fréquent après 12 mois 1C. Transmission interhumaine directe (exposition proche et prolongée), dissémination par voie hématogène.
– Pneumocoque (cocci gram +) : < 40 ans 50% ; > 40 ans 70%, plus fréquent entre 2-12 mois 60% 1C. Pas de contamination inter-humaine (portage asymptomatique : 50%), diffusion par contiguité++ (brèche), rarement hématogène (foyer ORL/pulmonaire)
– Listéria (bacille gram +) : 5%. Transmission alimentaire. Diffusion par voie hématogène (tube digestif)
– H. influenzae (bacille gram -) : plus rare depuis la vaccination 1C
– Streptocoque du groupe B : < 2 mois ++ 1C
– E. Coli : nourrisson 1C ou personne âgée
– Staph. aureaus ou epidermitis : neurochirurgie
Clinique | Paraclinique |
---|---|
Syndrome méningé fébrile | Ponction lombaire +++ |
A ) Clinique 1A
Début brutal, associant typiquement chez l’adulte : céphalées, fièvre, raideur de nuque, altération de la vigilance (dans 95% des cas, au moins 2 signes sont présents). Chez le nourrisson et le sujet âgé, la symptomatologie est moins typique.
Les signes sont secondaires à 3 syndromes :
Triade : Céphalée + vomissement + raideur de nuque
- Syndrome encéphalitique
Troubles de la vigilance : confusion, somnolence, coma
Signes de focalisation : déficit moteur, paralysie d’un ou plusieurs nerfs crâniens, aphasie, mouvements anormaux (tremblements, myoclonies)
Comitialité: crises partielles ou généralisées, jusqu’à état de mal
Troubles neurovégétatifs : irrégularité du pouls, de la PA et de la température
- Syndrome infectieux
Fièvre ± frissons, sueurs, myalgies
Purpura (fulminans : avec au moins 1 élément écchymotique > 3mm et/ou nécrotique 1B)
Signes d’infection associée (porte d’entrée ?): pneumopathie, foyer ORL, infection urinaire, atteinte digestive, éruption cutanée, atteinte cardiaque (endocardite, myocardite)
- Remarque : symptomatologie chez le nourisson 1C
Signes d’infection potentiellement sévère
Signes neurologiques : bombement de la fontanelle antérieure, hypotonie ou raideur anormale du rachis, signe neuro de localisation
OMA, foyer pulmonaire…
B ) Paraclinique 1B
Ponction lombaire (syst.) : examen clé du diagnostic positif et étiologique des méningites bactérienne (± précédé d’un bilan d’hémostase et/ou TDM cérébral pour éliminer une CI à la PL !)
– aspect macroscopique : trouble +++, parfois panaché (listéria, H. influenzae 1A)
– analyse cytologique : > 20/mm³, souvent >1000/mm³ ; PNN > 50%
– analyse biochimique : hypoglycorachie, hyperprotéinorachie (>1g/), lactatorachie >3.2mmol/l
– analyse microbio : examen direct et culture
– autre analyses (si examen microbio neg.) : Ag soluble pneumococcique ; puis (si neg.) PCR méningocoque (± PCR pneumocoque 1C)
Bio :
– Hémoculture ++
– Procalcitonine : > 0,5 mg/L en faveur d’une méningite bactérienne
– ± PCR méningocoque sérique (inutile si > 18h du début de ttt) 1C
Biopsie cutanée sur lésion pupurique avec recherche de méningocoque par culture et PCR (si PL impossible ou LCR non contributif)
C ) Diagnostic différentiel 1A
> Cause de méningites purulentes aseptiques (PNN altérés et culture stérile)
– Méningite virale à la phase initiale (protéinorachie < 1g, normoglycorachie)
– Processus expansif intracrânien infectieux ou non
– Méningite médicamenteuse
– Méningite inflammatoire
(+ méningite bactérienne décapitée par une prise d’antibiotique / bactérie fragile)
> Autres méningites (cf fiche : Méningite et Méningo-encéphalite (OD))
– Méningite bactérienne à liquide clair (tuberculose, syphilis, Lyme). Début progressif ++
– Méningo-encéphalite herpétique
– Méningite virale bénigne
> Autres causes de syndrome méningé
– Hémorragie méningée
– Méningisme
> Trouble de la vigilance dans le cadre d’un syndrome infectieux sévère 0
(ECBU systématique 1A)
A) Histoire naturelle – pronostic 1B
Les méningites bactériennes conduisent au décès sans traitement. Sous traitement, le pronostic est fonction du germe :
AGENT INFECTIEUX | MORTALITE | SEQUELLES |
---|---|---|
Toutes méningites bactériennes | 20 % | 30 % |
Méningocoque | 5 % si méningite 20 % si purpura fulm. |
5 % (surdité) |
Pneumocoque | 30 % | 20-30 % |
Listeria | 30 % | 30 % |
B) Complications 1A
Complications générales
– Sepsis / choc septique
– Purpura fulminans
– SIADH 1C
Complications neurologiques
– Abcès cérébral : collection avec effet de masse.
– Empyème sous-dural
– Hydrocéphalie par cloisonnement méningé
– Thrombose veineuse cérébrale
– Oedème cérébral, effet de masse jusqu’à engagement
– Encéphalite présuppurative
– Angéite cérébrale avec infarctus
Séquelles au long cours
– Troubles cognitifs, épilepsie (si encéphalite)
– Surdité
– Séquelles motrices
– Hydrocéphalie à pression normale retardée
Voir aussi : CAT devant un syndrome méningé fébrile (identique quelque soit l’étiologie)
A ) Bilan
- Bilan de gravité
– Purpura extensif
– Signes encéphalitiques : Glasgow < 8 , signes de focalisation / d’atteinte du TC, état de mal épileptique
– Critères de gravité hémodynamique : sepsis grave, choc septique
Bilan bio à la recherche de complication : NFS plaquettes, ionogramme sanguin, créatinine, glycémie (pour interprétation de la glycorachie), bilan hépatique, bilan d’hémostase
- Bilan étiologique
Le bilan étio d’une méningite bactérienne (= germe en cause) repose esentiellement sur le résultat de l’analyse bactériologique du LCS, et secondairement sur les hémoculture et les analyses spécifiques du LCS (PCR, Antigène…). Il existe de plus des signes cliniques évocateurs pour chaque germe.
Terrain | Clinique | LCS | |
---|---|---|---|
Méningoc. | Sujet sain, jeune, non immun Saison hivernal, cas groupé Déficit en complément / asplénie |
Début brutal, sd franc Pas de signe de loc. Purpura ! |
Cocci gram – |
Pneumoc. | Immunodépression Brèche ostéo-méningée |
Début brutal, sd franc Signes de loc., coma purpura (rare) Infection ORL-Pulmo |
Cocci gram + |
Listéria | > 50ans Grossesse Alcoolisme, immunodépression |
Début progressif Rhombencéphalite |
Bacille gram + |
H. Influenzae | Alcoolisme, immunodépression Enfant < 6ans non vacciné 1A |
± otite, épiglottite, arthite, pneumopathie 1A | Bacille gram – |
E. Coli | Age extrême | Tableau souvent trompeur | Bacille gram – |
B ) Traitement
- PEC symptomatique
Hospitalisation initiale systématique en soins intensifs recommandée !
– Antipyrétiques, antalgiques
– Prévention des complications de décubitus
– PEC respiratoire et hydroélectrolytique 0
– ± anticonvulsivants si crise 0
- Antibiothérapie
> Quand débuter l’ATBthérapie ?
– Immédiatement en pré-hospitalier si purpura fulminans extra-hospitalier (ceftriaxone 1ère intention, cefotaxime voire amox à défaut)
– Après les hémocultures et avant la PL si purpura fulminans à l’hôpital, CI à la PL ou délai de prise en charge > 90 min
– Juste après la PL si liquide purulent (ou forte suspicion de méningite bactérienne)
– Après les résultats de l’examen direct du LCS si liquide non purulent mais faisceau d’arguments en faveur d’une origine bactérienne.
« [l’ATBthérapie] doit être débutée au maximum 1 heure après le début de la prise en charge » .
> Quel choix de traitement ?
Traitement probabiliste : C3G IV systématique, associé ± à :
– Amox + gentamycine si suspicion de listéria (LCS panaché, signes cliniques évocateur) OU signe de gravité
– Gentamycine si < 3 mois 1A
Traitement adapté au germe puis à l’antibiogramme
Germe | ATB | Durée totale |
---|---|---|
Pneumocoque | 1- C3G R- Amox 1A |
10-14j |
Méningocoque | 1- C3G R- Amox |
4-7j |
Listeria | 1- Amox + gentamicine R- Amox seule après J7 1A 2- Cotrimoxazole |
21j 0 |
H. Influenzae | 1- C3G | 7j 0 |
E. Coli | 1- C3G (+ genta 2j si âge < 3 mois) 1A |
21j 0 |
1= 1ère intention ; 2= 2ème intention ; R= relai (si CMI < 0,1mg/L)
Note : les antibiotiques sont délivrés à dose méningée sans relai per os 1A
– Cefotaxime : 200-300 mg/kg/j
– Ceftriaxone : 75-100 mg/kg/j
– Amoxicilline : 200 mg/kg/j
– Gentamicine : 3-5 mg/kg/j
- Corticothérapie (Dexaméthasone IV) 1A
Indications : uniquement si
– suspicion de méningite bactérienne
– diagnostic de méningite à pneumocoque ou méningocoque chez l’adulte
– diagnostic de méningite à pneumocoque ou H. Influenzae chez l’enfant
ET
– débutée AVANT ou pendant la 1ère injection parentérale d’ATB
(Réduit de moitié les décès et séquelles dans les infections à pneumocoque)
Posologie
– 10mg (0,15 mg/kg chez l’enfant) x4 / jours
– Durée 4 jours (à arrêter avant si le diagnostic final retenu ne correspond pas aux indications)
- Surveillance
Surveillance clinique rapprochée les 24 premières heures (fièvre, signe neuro, périmètre crânien du nourisson1C). L’efficacité est essentiellement jugé sur la clinique.
Imagerie cérébrale à 48-72h. Indiquée si
– mauvaise évolution clinique (recherche d’une complication)
– méningite à germe inhabituel 1C
PL à 48-72h. Indiqué si
– mauvaise évolution clinique et imagerie normale
– méningite à pneumocoque avec CMI aux C3G > 0,5 mg/L 1C
– méningite à germe inhabituel 1C
Suivi prolongé (pendant 1 an)
– neuropsychologique
– audiométrique (en particulier pneumocoque chez le nourrisson. Bilan audiométrique à J15, puis tous les 3 mois pendant 1 an 1C)
C ) Mesures préventives et de santé publique 1B
- Méningite à méningocoque
Précautions gouttelettes (dès suspicion de méningite). A lever après 24h d’ATB
Déclaration obligatoire si le cas est confirmé (signalement en urgence + notification) 2
ATBprophylaxie des sujets contact, urgente ! (Rifampicine po 600mg x2/j pendant 2j 1A)
Sujet contact = contact direct (face à face), proche (<1m), et prolongé (>1h) avec les sécrétions oropharyngées d’un sujet infecté, dans les 10j précédents. Les cas particuliers sont détaillés dans une circulaire de la DGS (2014). Au minimum tous les membres vivant sous le même toit que le cas index.
Vaccination des sujets contact faisant partie de la communauté de vie du patient, après identification du sérogroupe (Vaccin C ou ACYW135 systématique ; Vaccin B sur indication HAS lors d’épidémies).
Pas de vaccination du sujet index.
Prévention primaire : Vaccination dans l’enfance
- Méningite à pneumocoque
Pas d’isolement ni d’ATB-prophylaxie pour les sujet contacts
Pas de déclaration obligatoire 2
Prévention primaire
– ATB-prophylaxie par pénicilline chez les splénectomisés récent
– Vaccination chez les sujets à risque
Prévention secondaire : recherche des facteurs favorisants
– Bilan ORL
– Electrophorèse des protéines, séro VIH
– Imagerie pour recherche de brèche ostéo-durale si ATCD de trauma/chirurgie crânien, récidive de méningite bactérienne, otorrhée/rhinorrhée chronique de LCS (liquide clair, riche en glucose !)
- Méningite à listéria
Déclaration obligatoire si le cas est confirmé (signalement en urgence + notification) 2
Prévention primaire
– Précaution alimentaire chez la femme enceinte et les personnes âgées
– Contrôle sanitaire des aliments
3 réponses à “Méningite bactérienne purulente”
Pour le type de bactérie, important à connaitre pour la PEC, voir également la fiche : Classification des bactéries
Concernant l’abcès cérébral, il apparait dans la liste des complications d’une méningite dans le ref de neuro MAIS la méningite n’apparait pas dans les causes d’abcès cérébral dans le pilly
Pour l’indication à la corticothérapie :
– Pilly : « la dexaméthasone est inutile en cas d’antibiothérapie parentérale préalable » (le pilly insiste sur le terme parentéral). Cela laisse supposé qu’une injection est possible suite à une injection im de ceftriaxone en cas de purpura.
– CEN : Cette subtilité n’apparait pas.
– Le ref. de pédia : « au plus tard dans l’heure suivant le début de l’antibiothérapie »