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Paludisme

Fiche MGS
Une Fiche MedG Maladie et Grand Syndrome
Fiche relue par un tiers. Dernière mise à jour le 28/07/21.
Dernières mises à jour
– Juillet 2021 : relecture de la fiche et mise à jour des sources Pilly et ANOFEL, ajout de la parasitologie, modifications mineures de la clinique, modifications de formes (Beriel
– Décembre 2018
 : mise à jour de la source Pilly, modifications mineures (Vincent)
– Mars 2018 : mise à jour des données du réf de pédiatrie (Vincent)
– Mars 2017 : création de la fiche (Vincent)


Sources utilisées dans cette fiche
MG : Informations issues d’une autre fiche MedG, traitant spécifiquement du sujet
0 : source isolée (prof en cours, site web) ou non identifiable
1A : Pilly Etudiant – Paludisme (Réf. d’Infectiologie – 2021)
1B : ANOFEL – Paludisme (Réf. de Parasito. et mycologie – 2019) [Indisponible en ligne – lien vers l’édition 2016]
1C : CNPU 7e édition 2017 – Pathologies infectieuses du migrant et de l’enfant voyageur (référentiel de pédiatrie – non disponible en ligne, lien vers l’édition 2014)

1) Généralité 1A

Déf 1B : parasitose essentiellement tropicale due à des protozoaires hématozoaires du genre Plasmodium.

  • Epidémiologie

1ère endémie tropicale dans le monde
– 4000 cas d’importation / an en France 
– 95% contractés en Afrique subsaharienne 
– 90% à P. falciparum

Mode de transmission :
– piqûre de l’anophele femelle, classiquement à partir du coucher du soleil (activité maximale de 23h-6h)1B 
– transmissions post-transfusion et post-transplantation possibles

  • Parasitologie 1B

Agent pathogène : 5 espèces pathogènes : P. falciparumP. vivax, P. ovale, P. knowleski et P. malariae . Réservoir strictement humain sauf P. knowleski (singe)1A

Plasmodium falciparum 
– Espèce la plus répandue ++ (tous les continents, zones intertropicales ++)
– Responsable de formes cliniques graves voire mortelles 
– Développe des résistances aux antipaludiques 
– Ne se transmet pas en dessous de 18°C

Plasmodium vivax 
– Répandue en Amérique du Sud et en Asie +++ ; rare en Afrique 
– 2e espèce la plus répandue 
– Ne se transmet pas en dessous de 15°C
– Accès de reviviscence possibles 

Plasmodium ovale 
– Afrique intertropicale du centre et de l’ouest ++ ; certaines régions du pacifique
– Rechutes tardives possibles (5 ans)

Plasmodium malariae : sévit de façon sporadique sur les trois continents tropicaux 

Plasmodium knowlesi : sévit en Asie du Sud-Est ++ (zone forestière, lié à la répartition des singes macaques) 

Cycle du parasite
Le cycle de vie des plasmodium (groupe des parasites Apicomplexa) est complexe, il comporte un cycle asexué = schizogonique dans l’hôte humain, et un cycle sexué chez l’anophèle. Les manifestations du paludisme sont liées à la schizogonie érythrocytaire, provoquant un tableau d’anémie hémolytique.

Cycle détaillé du parasite
1) Cycle schizogonique (parasitisme humain)

– Transmission : injection de sporozoïtes lors de la piqûre d’anophèle, atteignant et se multipliant dans le foie = schizogonie hépatique (asymptomatique, 1-2 semaines)
– Les plasmodiums à longue période d’incubation arrêtent plusieurs années leur cycle à ce stade, on parle de cryptozoites
– A l’issue d’une intense multiplication, passage sanguin (mérozoïtes), envahissement érythrocytaire = schizogonie érythrocytaire (trophozoïtes) et à nouveau multiplication (schizontes).
– Pour P. falciparum, cette phase se produit quasi-uniquement dans les capillaires viscéraux (cerveau ++) => formes graves
– L’éclatement des schizontes est généralement synchrone => accès palustre régulier
– La fin de ce cycle est marquée par la libération de nouveaux mérozoïtes qui vont infecter d’autres hématies, et des gamétocytes prêts à démarrer un cycle sexué

2) Cycle sexué (parasitisme anophèle)

A l’occasion d’une nouvelle piqûre, déglutition de gamétocytes puis fécondation aboutissant à une nouvelle génération de sporozoïtes stockés dans les glandes salivaires du moustique.

2) Diagnostic 1A

Clinique Paraclinique
Fièvre au retour d’une zone endémique Frottis + goutte épaisse

Toute fièvre au retour d’un pays d’endémie est un paludisme jusqu’à preuve du contraire.

A ) Clinique 1B

Incubation 
– 7 à 12 jours : P. Falciparum
– 10 jours à 2 mois (Reviviscence jusqu’à 4 ans) P. vivax et P. ovale
– 15 jours à plusieurs années : P. malariae 
– 1 semaine (?) : P. knowlesi

  • Accès palustre

Phase prodromique: lassitude, troubles digestifs 

Accès palustre simple à fièvre périodique : triade classique, apparition le soir ++
Frissons : violents, fièvre ≥ 39°C, malade blottit sous les draps,  diminution de la tension artérielle, splénomégalie et ictère1A (durée : environ 1 heure)
Chaleur : fièvre ≥ 40°C, peau sèche et brûlante, le malade rejette les draps, céphalées, douleurs abdominales, myalgie1A  (durée : 3-4 heures)
Sueurs : elles sont profuses et baignent le malade, émission d’urines foncées, chute de la température (voire hypothermie), remontée de la TA (durée : 2-4 heures)

Fin de l’accès : sensation d’euphorie, de bien être

Périodicité de l’accès fébrile
– Fièvre tierce (J1-3-5) pour P. falciparum, vivax et ovale
– Fièvre quarte (J1-4-7) pour P. malariae
– Fièvre quotidienne : P. knowlesi 

  • Autres formes

Paludisme viscéral évolutif : forme chronique observée chez l’enfant ou l’adulte non-prémuni et/ou mal traité, associant signes d’anémie, retard staturo-pondéral et faible parasitémie.

Splénomégalie palustre hyper-réactive : surtout chez l’adulte autochtone de zone impaludée. Maladie à complexes immuns avec hypersplénisme (chute des 3 lignées sanguines)

Formes graves : cf. complications.
! Tout accès palustre peut évoluer en quelques heures en forme grave !

Particularités chez l’enfant 1C
– Fréquence des convulsions, troubles de la conscience 1B , hypoglycémies et anémies
– Ictère, insuffisance rénale et hyper-parasitémie sont rarement observés
– Formes trompeuses : fièvre inconstante, troubles digestifs +++, abdomen pseudo-chirurgical 1B

B ) Paraclinique

Frottis sanguin / goutte épaisse ++++ (résultat dans les 2h)
– Gold standard
– Identification de l’espèce et quantification de la parasitémie
– A répéter à H12 si la 1ère recherche est négative, notamment sous prophylaxie 1C

Test de diagnostic rapide TDR : détection des antigènes HRP2 jusqu’à 3 semaines après inoculation, ou pHDL. Sensibilité > 95%. Pas d’expertise particulière, mais sensibilité dépendante de la parasitémie

Sérologie dans des indications particulières 1B
– Diagnostic rétrospectif et enquêtes épidémiologiques
– Diagnostic d’une forme viscérale évolutive (élévation modérée IgG) ou d’une splénomégalie hyper-réactive (sérologie fortement positive à IgG et IgM)
– Contrôle des donneurs de sang ou d’organe à risque

Signes biologiques d’orientation
– NFS plaquettes : thrombopénie quasi-constante, ± anémie régénérative et leucopénie sans hyperéosinophilie
– Syndrome inflammatoire biologique (CRP > 100 le plus souvent)
Signes d’hémolyse (augmentation des LDH et bilirubine libre, haptoglobine basse)
– Signes de cytolyse hépatique (prédominant sur les ASAT) inconstants

C ) Diagnostic différentiel

Cf étiologies des fièvre aiguës (item 144) et au retour de voyage en zone tropicale (item 171).

3) Evolution 1B

A) Histoire naturelle

Dans les zones d’endémie, une immunité acquise (plutôt « prémunition » ou « semi-immunité ») se met lentement en place en cas d’exposition continue, non-stérilisante mais empêchant la survenue de formes graves.
! Perte progressive de l’immunité en zone tempérée, en 2-3 ans chez un sujet transplanté !
Les enfants de 4-6 mois sont les plus à risque de forme grave après la perte de l’immunité passive maternelle.

B) Complications

Neuropaludisme 
– Début brutal : fièvre, coma, convulsion ± détresse respiratoire
– Phase d’état : hypotonie + signes précédents, atteinte multiviscérale 
– Mortalité préoccupante malgré la prise en charge (5-10%)

Sepsis / choc septique / défaillance multiviscérale

Chez le fœtus (en particulier 1e et 2e-pare) : fausse couche et l’hypotrophie néonatale, une co-infection VIH favorise la transmission des 2 infections.

4) PEC 1A

A ) Bilan initial

  • Recherche de signe de gravité

La présence d’un signe de gravité nécessite l’avis d’un réanimateur

Critère clinique Critère bio-radio
Trouble neuro : obnubilation, confusion, somnolence, coma avec score de Glasgow < 11
Trouble CV : signes périph. d’insuffisance circulatoire , PAS < 80 mmHg
Trouble respi : PaO2 < 60 mmhg, SpO2 < 92% en air ambiant, FR > 30 / min (si ventilation :  PaO2/FiO2 < 300 mmHg)
Hémorragie
Ictère clinique
Diurèse < 400mL/J malgré hydratation 1B
Hyperlactatémie > 2 mmol/L
Hyperbilirubinémie totale > 50µmol
Hyperparasitémie > 4% **
Anémie profonde : Hb < 7 g/dL – Hte < 20%
Hypoglycémie < 2,2 mmol/L
Acidose métabolique (compensée ou non) bicar < 15 mmol/L – pH < 7,35
Insuffisance rénale aigüe : créat > 265 μmol/L – urée > 17 mmol/L1B

Sd interstitiel/alvéolaire radiologique (thorax)

** Pour P. Falciparum. Le critère d’hyper-parasitémie est ramené à 2% pour P. Knowleski, et ne doit pas être pris en compte pour P. Vivax (dépasse rarement 2%).

  • Recherche d’un critère d’hospitalisation

Les conditions permettant un traitement ambulatoire sont rarement remplis. On décidera d’une hospitalisation s’il existe :
– 1 signe de gravité (ci-dessus)
– 1 FdR de gravité lié au terrain : jeune enfant et sujet âgé, grossesse, immunodépression et splénectomie, comorbidité…
– 1 signes biologique parmi : thrombopénie < 50.000, Hb <10 g/dL, parasitémie > 2%, créat > 150 µmol/L
– des difficultés diagnostiques (fiabilité, rapidité)
– si le traitement ambulatoire est compromis : malabsorption (traitement po), difficultés psychosociales, personne éloignée d’un centre hospitalier ou vivant seul…
– en cas d’échec d’un premier traitement

B ) Traitement

Antipaludiques : le choix de la molécule dépend de l’espèce en cause, de la gravité et du contexte clinique (vomissements en particulier empêchant le traitement PO). Une fiche détaillée sur les antipaludiques est disponible sur cette pagePrincipales molécules utilisées en France :

CAT P. falciparum / knowleski grave P. falciparum / knowleski non-grave P. vivax, ovale ou malariae
1ère intention Artésunate à H0, 12 et 24 puis toutes les 24h pendant 3j
Dérivés artémisinine CQ ou dérivés artémisinine (à préférer si infection mixte ou P. Vivax importé de zone de résistance à la CQ)
Primaquine dès le 1er accès à P. Vivax ou Ovale (ATU, prévient les récidives)
2nde intention Q idem forme non-grave avec vomiss. + dose de charge AVP
Q per os 3e intention
Cas particuliers  – Vomissements : Q en IV lente ou IVSE dans du G5%, 24 mg/kg/j, puis relai PO dès que possible
Enfant : MQ utilisable en 2ème intention
Grossesse : dérivés de l’artésunate CI au 1er trimestre, Q ou AVP en 1ere intention

Légende :
– AVP = Atovaquone-proguanil
– Dérivés de l’artémisinine : dihydroartémisinine-pipéraquine, et artéméther-luméfantrine, voie PO
– Q = Quinine voie PO ou IV
– MQ = Méfloquine voie PO, longue demi-vie
– CQ = Chloroquine voie PO
– Artésunate voie IV : maximum 7j, relai PO par dérivé d’artémisine après > 2 doses

Mesures complémentaires : 
– déclaration obligatoire des cas autochtones
– arrêt de la chimioprophylaxie une fois l’accès traité

C) Suivi 

Clinique : température, troubles digestifs

Biologique : 
– Biologique 
– Parasitologique (frottis-goutte épaisse à J3, J7, J28)
– Recherche d’hémolyse retardée liée à l’artésunate jusqu’à 1 mois

D) Prévention 

Elle comporte 3 volets : des mesures anti-piqûre, la prophylaxie médicamenteuse et l’information aux voyageurs en zone d’endémie.

Protection contre les anophèles ++
– Peau couverte, moustiquaires, répulsifs et insecticides 
– Répulsifs cutanés CI avant l’âge de 6 mois, utilisation prudente jusqu’à 30 mois 1C

Chimioprophylaxie : ces molécules ou associations sont à prendre quotidiennement au cours du repas pendant tout voyage en zone d’endémie, sauf pour la méfloquine (prise hebdomadaire), et prolongé après le voyage. Elles ne préviennent pas à 100 % la contamination, et sont à choisir selon les risques spécifiques du patient et les données épidémiologiques du pays visité.

Molécule Modalités d’utilisation CI 1C
Atovaquone-proguanil Prise quotidienne ; Séjour + 1 semaine Poids < 11 kg, 5 kg en pratique
Méfloquine Prise hebdo, 10j avant + séjour + 3 semaines Poids < 15 kg, ATCD psy ou neuro
Doxycycline Prise quotidienne ; Séjour + 4 semaines Age < 8 ans

Education sanitaire : consulter en cas de fièvre ++

 

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4 réponses à “Paludisme”

  1. Message ASNM concernant la mefloquine (Lariam) :
    « Le Lariam ne devra ainsi être envisagé qu’en dernière intention dans la chimioprophylaxie du paludisme »
    « L’utilisation du Lariam est contre-indiquée en chimioprophylaxie chez les patients présentant ou ayant présenté des troubles psychiatriques (dépression, anxiété généralisée, idées suicidaires….) ou des antécédents de convulsions. »

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