1) Généralité 1B
Déf : passage de contenu gastrique à travers le cardia, en dehors de tout effort de vomissement. 1A
RGO physiologique : présent à tout âge, forme peu abondante et non-compliquée. Il peut être quotidien chez le nourrisson de < 1 an (grand volume liquide ingéré + système anti-reflux non-fonctionnel).
RGO pathologique : en cas forme compliquée ou résistante au traitement, de lésions d’œsophagite objectivées, de signes extra-digestifs, d’anomalie anatomique ou fonctionnelle.
Physiopathologie : le sphincter inférieur de l’œsophage (SIO), est une zone de haute pression qui s’oppose au gradient abdo-thoracique. Des relaxations transitoires ou une hypotonie ± permanente du SIO sont les principaux mécanismes en cause.
D’autres facteurs interviennent :
– Inadéquation volume gastrique / volume liquide ingéré avant 1 an (volumes trop importants > 120 mL/kg/j)
– Retard à la vidange gastrique (repas caloriques / riche en graisse ++)
– Augmentation de la pression intra-abdo
– Corrélation avec les hernies hiatales (cf histoire naturelle)
Epidémiologie
– Chez l’enfant régurgitations physiologiques > 60% à 4-5 mois, puis diminution jusqu’à 5% à l’âge de 1 an.
– Chez l’adulte 1A : pyrosis 40%, hebdomadaire 10% voire quotidien (2-5%)
2) Diagnostic 1
Clinique | Paraclinique |
---|---|
Pyrosis + régurgitation acide | ± FOGD si signes atypiques / après 50 ans |
A ) Clinique
-
Anamnèse
FdR de RGO pédiatrique 1B : encéphalopathie, atrésie de l’oesophage opérée, hernie diaphragmatique congénitale, mucoviscidose
-
Examen physique
La clinique peut varier de la simple brûlure épigastrique à la forme compliquée.
Signes digestifs
– Pyrosis = brûlure rétrosternale ascendante, à point de départ épigastrique
– Régurgitations acides = remontées du contenu gastrique jusqu’au niveau pharyngé sans effort de vomissement
L’association de ces 2 signes est quasi-pathognomonique, elle permet le diagnostic clinique de RGO. Leur caractère postural (décubitus) ou post-prandial renforce la probabilité.
Signes extra-digestifs : le lien causal n’est pas toujours établi
– Toux, dyspnée asthmatiforme, enrouement
– Dysesthésies buco-pharyngées, gingivites, érosions dentaires, caries à répétition
– Otalgie (surtout droite)
– Laryngite postérieure
– Douleurs précordiales pouvant simuler un angor
– Troubles du sommeil, micro-éveils nocturnes
– Malaise du nourrisson 1B : accès de pâleur ou cyanose, trouble du tonus ± perte de contact, apnées et/ou bradycardies
B ) Paraclinique
Fibroscopie Oeso-Gastro-Duodénale FOGD (sensi = 50-70%)
– Objective des lésions d’oesophagite, détermine la gravité des lésions (ulcérations étendues, circonférentielles, sténose peptique)
– On observe parfois un anneau de Schatzky très caractéristique, juste au-dessus du cardia 0
Explorations fonctionnelles
– pHmétrie des 24h : examen le plus sensible pour les RGO pathologiques, quantifie l’exposition acide et vérifie la corrélation aux symptômes (RGO franchement pathologique si > 10% du temps avec un pH < 4 1B)
– Impédancemétrie : seul examen objectivant un reflux non-acide !
– Manométrie : identifie des facteurs aggravants (hypotonie franche du SIO, troubles péristaltiques œsophagiens)
Vidéo-capsules à l’étude pour détecter des complications
C ) Diagnostic différentiel
Syndrome de rumination : régurgitation d’origine psychologique d’aliments récemment mastiqués et avalés, s’arrêtant typiquement quand le reflux devient acide. PEC par thérapie comportementale.
Attention à la rumination du diverticule de Zenker chez le sujet âgé !
Allergie aux protéines de lait de vache (APLV) 1B : à évoquer devant un RGO supposé physiologique ne régressant pas sous RHD.
3) Evolution 1A
A) Histoire naturelle
Evolution des lésions 1C
Les complications sont liées à une inflammation chronique des tissus de l’œsophage (oesophagite), qui peut exister à bas bruit ou provoquer des lésions d’abord endoscopiques et histologiques.
Corrélation RGO et hernies hiatales
Hernie hiatale par glissement (85%) : ni nécessaire, ni suffisante pour expliquer un RGO
Glissement intra-thoracique du cardia sans péritoine
Hernie hiatale par roulement (15%) : sans lien avec le RGO !!
Poche intra-thoracique formée par la grosse tubérosité et son péritoine sans le cardia, le risque est l’étranglement herniaire.
B) Complications 1C
Perte de substance : lésions épithéliales (érosions), muqueuses (ulcération) ou musculeuses (ulcère) jusqu’à l’hémorragie digestive
Sténose peptique par fibrose, avec dysphagie et amaigrissement
Endobrachyoesophage (EBO) = œsophage de Barrett : complication d’un RGO chronique, lésions métaplasiques pouvant évoluer en cancer
4) PEC 1A
A ) Bilan
Différents examens sont disponibles selon les situations, la FOGD bien que peu sensible reste l’examen de 1ère intention chez l’adulte (non-systématique) 1A. Le recours à la pHmétrie semble être plus fréquent en pédiatrie 1B.
En présence de symptômes digestifs typiques avant 50 ans, aucun bilan n’est nécessaire 1A ! Il n’y a pas lieu de pratiquer d’investigations paracliniques devant un RGO cliniquement évident et non compliqué, sauf en cas de malaise 1B !
Examen | Indications |
---|---|
FOGD | Adulte : symptôme atypique / RGO après 50 ans Enfant 1B : recherche d’oesophagite ou d’anomalie anatomique |
pHmétrie des 24h | Adulte – FOGD normal – Symptômes extra-digestifs – Forme résistant aux IPP – Avant chirurgie anti-reflux Enfant 1B – RGO non cliniquement évident, formes extra-dig – Analyse de la relation entre RGO et signe observé – Evaluation de l’efficacité d’un traitement en cas d’échec |
Impédancemétrie | Forme résistant aux IPP |
Manométrie | Avant chirurgie anti-reflux |
Transit baryté oeso-gastrique | Sténose peptique Hernie hiatale volumineuse |
B ) Traitement
RHD
– Réduction pondérale, arrêt du tabac et de l’alcool
– Surélévation de la tête à 45° du lit
– Intervalle de 3h entre le dîner et le coucher
– Chez l’enfant 1B : position dorsale de sommeil chez le nourrisson, inclinaison du lit chez l’enfant, épaississement du lait (lait AR), réduction des volumes liquides si besoin.
Traitements médicamenteux
– Antiacides : neutralisation du contenu gastrique
– Inhibiteurs de la pompe à proton (IPP) : inhibition de la sécrétion acide
– Alginates : limite l’extension vers le haut du RGO, protection de la muqueuse oesophagienne
– Baclofène 0 : agit sur les relaxations transitoires du SIO, souvent mal toléré
Notes
– Les prokinétiques (stimulation de la motricité oesophagienne) n’ont pas prouvé leur efficacité.
– En pédiatrie 1B : la prescription d’IPP est limitée à 2 molécules (oméprazole et ésoméprazole) et 3 indications (oesophagite érosive objectivée par OGD ; complications extra-dig d’un RGO acide identifié par pHmétrie ; pyrosis mal toléré de l’enfant en âge de s’exprimer). Le traitement par IPP n’est possible avant 1 an que dans le cadre d’une oesophagite prouvée (hors AMM) ; les alginates sont d’efficacité contestée ; les antiémétiques ne doivent pas être utilisés.
Traitement chirurgical : utile à des patients nécessitant un traitement au long cours, avec une hernie hiatale importante. Les résultats sont meilleurs en cas d’amélioration des symptômes sous IPP.
2 techniques : fundoplicature complète de Nissen ++ VS hémifundoplicature postérieure de Toupet.
Traitement du RGO de l’adulte en pratique (Afssaps 2007)
Sauf mention contraire, les posologies correspondent à la dose minimale efficace.
Les IPP ne sont pas recommandés en cas de manifestations extra-digestives isolées.
Situation | Traitement initial (Afssaps 2007) | Traitement au long cours / prévention (Afssaps 2007) |
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RGO typique sans oesophagite | Antiacide / alginate / antiH2 IPP demi-dose (sauf omeprazole pleine dose) 4 semaines si épisodes fréquents (>1 / sem) |
IPP à la demande IPP au long cours si rechutes fréquentes / précoce |
RGO avec oesophagite peu sévère | IPP demi-dose 4 semaines, pleine dose si persistance | IPP au long cours si rechutes fréquentes |
RGO avec oesophagite sévère | IPP pleine dose 8 semaines | IPP au long cours |
RGO résistant aux IPP, documenté | IPP dose augmentée ou IPP + antiacides Rarement baclofène 0 |
IPP au long cours |
Sténose peptique | IPP pleine dose en continu Dilatations endoscopiques |
2 réponses à “Reflux Gastro-Oesophagien”
bonjour
vous parlez d’encéphalopathie provoquée par le RGO dans le titre de votre site ! Or à la lecture de celui-ci vous en faites pas du tout allusion
cordialement
Jean-Louis Langevin
Bonjour et merci pour votre commentaire,
Cependant, je ne comprends pas votre remarque… Il est noté dans la fiche que, chez l’enfant, l’encéphalopathie (peri-natal je suppose) est un risque de RGO. C’est tout ce que je vois !