Pédiatrie
Fiche réalisée selon le plan MGS
Item ECNi 43
Déf : le syndrome de l’X fragile (Xfra) est une affection génétique liée à une mutation instable du gène FMR1 (bande Xq27.3 à l’extrémité du bras long), qui code la protéine FMRP, indispensable au fonctionnement synaptique.
Ce gène comporte un nombre de répétitions de triplets CGG correspondant à plusieurs états de gravité croissante
– Séquence normale : < 45 triplets CGG, en moyenne 30
– Allèles non-pathogènes intermédiaires (instables) : 45 – 54 triplets
– Prémutation : 55 à environ 200 triplets, sans hyperméthylation
– Mutation : > 200 triplets, hyperméthylation de l’ADN, plus de transcription
Note : ce type de mutation (répétition de triplets de nucléotides) est instable et tend à s’expandre au fil des générations, il s’observe également dans la chorée de Huntington et la dystrophie myotonique de Steinert.
Epidémiologie
– Prémutation : 1 / 400 hommes, 1 / 200 femmes
– Mutation : 1 / 4000 garçons, 1 / 8000 filles. 2e cause génétique de déficience intellectuelle après la T21, 1ère cause monogénique
– Transmission liée à l’X : maternelle +++, ou paternelle à un fœtus féminin pour un allèle intermédiaire ou prémuté
Physiopathologie : un nombre important de répétitions de triplets CGG prédispose à des erreurs de réplication (expansion du nombre de triplets). FMRP est une protéine chaperonne qui transporte et module la traduction de divers ARNm du noyau vers le dendrite neuronal.
En cas de prémutation, l’ARNm est fonctionnel mais instable, il tend à former des agrégats toxiques dans les noyaux neuronaux. Dans le cadre d’une mutation, l’ADN de FMR1 devient hyperméthylé et n’est plus transcrit, il n’y a pas d’ARNm issu du chromosome atteint (donc aucune protéine FMRP chez l’homme, et un nombre réduit issu du X normal chez la femme).
Clinique | Paraclinique |
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Prémutation : FXTAS chez l’homme, ménopause précoce chez la femme Mutation complète : déficience intellectuelle chez 100 % des garçons et 50 % des filles |
Recherche spécifique de X fragile (PCR fluorescente + western blot) |
A ) Clinique
La prémutation et la mutation FMR1 sont responsables de phénotypes différents. Seule la mutation complète est responsable du syndrome de l’X fragile avec déficience intellectuelle. Le diagnostic clinique est difficile car les signes évocateurs sont discrets et peu spécifiques (souvent bilan d’une déficience intellectuelle non-syndromique).
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Terrain / FdR
Il n’existe pas de mutation complète de novo, le diagnostic d’un Xfra a donc toujours des implications familiales.
L’histoire naturelle des anomalies génétiques de Xfra s’étend sur plusieurs générations : l’expansion des triplets CGG est exceptionnelle dans un allèle normal, rare pour un allèle intermédiaire (≥ 2 générations pour aboutir à la mutation), mais elle devient systématique à chaque méiose pour une prémutation.
1 parent porteur de prémutation
– Prémutation courte : faible risque a priori de transmettre la mutation complète, d’autant plus s’il existe des triplets AGG
– Prémutation longue (> 110 CGG) : risque a priori très élevé de transmettre la mutation complète (> 90% 0)
– Une mère porteuse de la prémutation et ayant déjà eu un enfant de phénotype Xfra a un risque comparable à celui d’une femme mutée (50 % de transmission)
Mère porteuse d’une mutation complète (avec ou sans expression clinique)
– 50 % des garçons auront un phénotype Xfra
– 50 % des filles seront porteuses du gène muté, 25 % auront un phénotype Xfra
Père porteur d’une mutation complète (phénotype Xfra) : toutes les filles seront porteuses, les garçons n’ont aucun risque
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Prémutation FMR1
FXTAS (Fragile X Tremor Ataxia Syndrome)
– Incidence cumulée = 20 % entre 50 et 60 ans, 75 % après 80 ans chez l’homme, incidence faible chez la femme, précocité et sévérité corrélées au nombre de triplets
– Tableau neurodégénératif évoluant progressivement vers la démence
– Tremblements pseudo-parkinsoniens, ataxie cérébelleuse puis troubles de la mémoire à court terme, dégradation des fonctions exécutives
IOP (Insuffisance ovarienne prématurée)
– Prévalence = 20 % des femmes porteuses (risque relatif = 20)
– Ménopause précoce = aménorrhée > 4 mois avant 40 ans, et niveau de FSH post-ménopausique
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Mutation complète FMR1 : syndrome de l’X fragile
Xfra chez l’homme | Xfra chez la femme | |
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Développement psycho-moteur | Déficience intellectuelle constante, modérée (QI = 40-50) Autres troubles neurodéveloppementaux : TSA (30%), hyperactivité, troubles des acquisitions (langage ++) et des apprentissages |
Déficience intellectuelle (50%) de sévérité variable , parfois aussi importante que celle des hommes Xfra (10%) |
Dysmorphie faciale (Devient plus évidente avec l’âge) |
Visage allongé, grandes oreilles décollées Macrocéphalie, front allongé, menton long et marqué |
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Autres signes | Macro-orchidie après la puberté +++ ± Epilepsie, hyperlaxité ligamentaire, prolapsus de valve mitrale… |
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B ) Paraclinique
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Diagnostic positif
PCR fluorescente : ne détecte aucun allèle de petite taille chez le garçon, ou 1 seul chez la fille (dans le cas contraire, la PCR élimine le diagnostic et établit le nb de triplets d’un allèle normal ou d’une prémutation courte)
Western Blot : identifie une grande expansion et établit le profil de méthylation
Notes
– Certains kits combinent ces 2 approches complémentaires en 1 étape
– L’X fragile ne se voit pas sur un caryotype standard, et les techniques de séquençage haut débit ne sont pas adaptées à l’identification des mutations par expansion de triplets
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Diagnostic prénatal (DPN)
Le DPN doit être discuté avec toute femme porteuse d’une prémutation ou d’une mutation complète en raison du risque de récurrence, après une consultation génétique.
Un diagnostic de sexe foetal peut être proposé à 10 SA par recherche d’ADN libre circulant foetal spécifique du Y, et influencer les décisions qui suivront : tous les garçons porteurs de la mutation complète présenteront une déficience intellectuelle, mais seulement la moitié des filles.
Les techniques de PMA permettent une alternative : le diagnostic pré-implantatoire. Le diagnostic est alors réalisé sur 1 seule cellule d’embryon au stade de morula, seuls les embryons portant un X non-muté (2 chez la fille) sont implantés.
A ) Bilan – Conseil génétique
Principales indications : cet entretien s’adresse schématiquement
– Aux femmes (conductrices) pour évaluer le risque de transmission future
– Aux hommes pour dépister les prémutations (diagnostic pré-symptomatique du FXTAS)
La recherche de mutation ou de prémutation chez les parents d’un enfant atteint permet la reconstitution de l’arbre généalogique (pas de mutation de novo), dans le but d’évaluer les risques futurs et d’envisager les stratégies de prévention (cf. Terrain / FdR, et la fiche Diagnostic pré-natal et IMG).
L’obligation d’information à la parentèle (arrêté du 8 décembre 2014) s’applique dans ce cadre : la personne peut refuser de transmettre elle-même les informations à ses proches à risque, mais elle est alors tenue de communiquer les coordonnées des intéressés au médecin.
B ) Traitement 0
Il n’existe aucun traitement curatif du syndrome de l’X fragile ni du syndrome FXTAS. 1A
PEC médicale : traitement des symptômes et complications
PEC sociale et paramédicale
– ALD 100 %
– Rééducation psychomotrice (en CAMSP ou SESSAD)
– Rééducation orthophonique possible dès 1 an
– Adaptations scolaires : classes habituelles avec AVS, ULIS ou IME
– ± Suivi psychologique